Cour administrative d’appel de Marseille, 26 novembre 2002, n° 01MA01801, M. Geoffrey L.

En l’absence d’indication sur la décision de rejet, de la signature, du nom, du prénom de l’autorité administrative de l’Etat, le document est entâché d’illégalité car méconnaît les dispositions de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE MARSEILLE

N° 01MA01801

M. Geoffrey L.

M. LAPORTE
Président

Mme FERNANDEZ
Rapporteur

M. BOCQUET
Commissaire du Gouvernement

Arrêt du 26 novembre 2002

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE MARSEILLE

(2ème chambre)

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d’appel de Marseille le 10 août 2001 sous le n° 01MA01801, présentée par M. Geoffrey L. ;

M. L. demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement en date du 19 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 13 décembre 2000 par laquelle le recteur de l’académie d’Aix-Marseille a rejeté sa demande de prêt d’honneur ;

2°) d’annuler la décision 13 décembre 2000 par laquelle le recteur de l’académie d’Aix(Marseille a rejeté sa demande de prêt d’honneur ;

Il soutient que le jugement attaqué est irrégulier car il lui a opposé une irrecevabilité sur le fondement d’une mise en demeure du 26 janvier 2001 qui ne lui est jamais parvenue ; que la décision attaquée méconnaît l’article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dès lors qu’elle ne comporte pas la signature, le prénom et le nom de son auteur ; que la motivation de celle-ci est insuffisante eu égard aux exigences de l’article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le jugement ;

Vu les mémoires enregistrés au greffe les 7 et 11 septembre 2001 présentés par M. L. tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré au greffe le 21 septembre 2001 présenté par M. L. tendant aux mêmes fins que la requête ;

Il soutient en outre que n’ayant pas été invité par le tribunal administratif à régulariser sa demande d’annulation de la décision rectorale du 13 décembre 2000, le rejet de cette demande pour une irrecevabilité susceptible d’être couverte après l’expiration du délai de recours, méconnaît les dispositions de l’article R.612-1 du code de justice administrative ;

Vu les mémoires enregistrés au greffe le 11 octobre 2001 et 16 janvier 2002 présentés par M. L. tendant aux mêmes fins que la requête ;

Il soutient en outre que si la décision attaquée indique dans sa motivation que le document qui lui a été envoyé est " un extrait de l’arrêté collectif relatif au rejet de votre demande ", cet arrêté n’existe pas ;

Vu le mémoire enregistré au greffe le 29 janvier 2002 présenté par le ministre de l’éducation nationale tendant au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision attaquée n’a pas à être motivée car elle n’entre pas dans le champ d’application de la loi du 11 juillet 1979 ; que si M. L. invoque l’article 4 de la loi du 12 avril 2000, le document du 13 décembre 2000 reçu par M. L. n’est que la notification de la décision du comité des prêts d’honneur qui s’est réuni le 29 novembre ; qu’une notification a pour but d’informer personnellement l’intéressé d’une décision mais n’implique nullement l’obligation de transmettre l’original signé de la décision à l’intéressé ; que la fonction du recteur, président du comité doit cependant être mentionné, ce qui est le cas en l’espèce ;

Vu le mémoire enregistré eu greffe le 5 février 2002 présenté par le ministre de l’éducation nationale tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré au greffe le 19 février 2002 présenté par M. L. tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré eu greffe le 18 mars 2002 présenté par le ministre de l’éducation nationale tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 12 novembre 2002
- le rapport de Mme FERNANDEZ, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que l’article 1089 B du code général des impôts, reproduit à l’article L.411-1 du code de justice administrative, dans leurs rédactions applicables à la date d’introduction de la demande de M. L. devant le Tribunal administratif de Marseille et tendant à l’annulation de la décision du 13 décembre 2000 par laquelle le recteur de l’académie d’Aix-Marseille a refusé de lui accorder un prêt d’honneur, soumet à un droit de timbre de 100 F toute requête enregistrée auprès des tribunaux administratifs ; qu’aux termes de l’article R.411-2 du code de justice administrative : " Lorsque la formalité prévue à l’article 1089 B du code général des impôts est requise et n’a pas été respectée, la requête est irrecevable. " ; qu’aux termes de l’article R.612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d’une irrecevabilité susceptible d’être couverte après l’expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d’office cette irrecevabilité qu’après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) ; qu’enfin aux termes de l’article R.612-2 dudit code : " S’agissant des irrecevabilités prévues aux articles R.411-2, R.441-3, R.412-1, R.431-2 et R.811-7, la demande de régularisation peut prendre la forme de la mise en demeure. A l’expiration du délai, qui ne peut être inférieur à un mois, fixé dans une mise en demeure par le président de la formation de jugement (...), les irrecevabilités prévues aux articles R.411-2, R.441-3, R.412-1, R.431-2 et R.811-7 ne sont plus susceptibles d’être couvertes en cours d’instance. ... " ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la mise en demeure en date du 26 janvier 2001 pour régularisation du défaut de timbre dont était entachée la demande de M. L., laquelle au demeurant n’accordait qu’un délai de quinze jours pour cette régularisation à compter de réception par le destinataire, a été envoyée une première fois à une adresse différente de celle indiquée par M. L. dans sa demande ; que si après le retour du pli non réclamé, une deuxième expédition a été effectuée, l’adresse indiquée sur le pli présentait encore des erreurs ; que dans ces conditions le Tribunal administratif de Marseille ne peut être regardé comme ayant valablement adressé à M. L. la mise en demeure prévue à l’article R.612-2 précité du code de justice administrative ; qu’il s’ensuit, qu’à défaut de la demande de régularisation prescrite par l’article R.612-1 précité du même code, l’irrecevabilité tirée du défaut de timbre susceptible d’être couverte après le délai de recours, ne pouvait être opposée, en vertu des dispositions de ce même article, à M. L. pour rejeter sa demande ; qu’ainsi le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 19 juin 2001 est entaché d’irrégularité et doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. L. devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi susvisée du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Sont considérées comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l’Etat ... " ; qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 4 de cette même loi : " Toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. " ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la décision du 13 décembre 2000 notifiée à M. L., par laquelle le recteur de l’académie d’Aix-Marseille, président du comité local des prêts d’honneur, a rejeté sa demande de prêt d’honneur, à laquelle ne s’est pas substituée la décision du 14 février 2001 répondant au recours gracieux en date du 8 janvier 2001 présenté par le requérant et confirmant la décision initiale, ne portait ni la signature, ni le nom, ni le prénom de cette autorité administrative de l’Etat en méconnaissance des dispositions précitées de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; que si le ministre soutient que le document en date du 13 décembre 2000, reçu par M. L., ne serait qu’une ampliation, il ne produit pas d’original portant toutes les mentions exigées par lesdites dispositions ; que dès lors, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, M. L. est fondé à demander l’annulation de la décision rectorale du 13 décembre 2000 dont s’agit ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 19 juin 2001 et la décision du recteur de l’académie d’Aix-Marseille en date du 13 décembre 2000 sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. L. et au ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche.

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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article1642