Si la responsabilité pouvant incomber à l’Etat au titre d’un manquement des services de police dans leur mission de surveillance des installations aéroportuaires, doit être appréciée sur le terrain de la faute simple, la cour administrative d’appel qui, pour écarter l’existence d’une telle faute, s’est fondée sur ce que l’aérodrome de Calvi était entièrement clôturé et qu’aucune menace particulière, dont les services de police auraient été avertis, n’avait été formulée à l’encontre du propriétaire de l’avion, n’a pas entaché son arrêt d’une erreur de qualification juridique des faits.
CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 232537
GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE
Mme Imbert-Quaretta
Rapporteur
Mme de Silva
Commissaire du gouvernement
Séance du 3 février 2003
Lecture du 3 mars 2003
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 2ème et 1ère sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 2ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 avril 2001 et 31 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE, dont le siège est 50, rue Ampère à Paris (75017) ; le GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE demande au Conseil d’Etat
1°) l’annulation de l’arrêt du 23 novembre 2000 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 11 juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’Etat à lui verser la somme de 2 480 000 F (378 073,56 euros), en réparation du préjudice causé par la destruction d’un avion dont le requérant est l’assureur, par un engin explosif, dans la nuit du 26 au 27 octobre 1991, sur l’aéroport de Calvi ;
2°) la condamnation de l’Etat au paiement de cette somme, majorée des intérêts eux-mêmes capitalisés ;
3°) la condamnation de l’Etat au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;
Vu le code de justice administrative,
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de Mme Imbert-Quaretta, Conseiller d’Etat,
les observations de Me Cossa, avocat du GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE,
les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 92 de la loi du 7 janvier 1983, dont les dispositions sont aujourd’hui reprises à l’article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales : " L’Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. " ; qu’en estimant que la découverte d’une inscription " FLNC " près des débris de l’avion " Morane-Saulnier " qui avait été détruit à l’explosif sur l’aérodrome de Calvi Sainte Catherine dans la nuit du 26 au 27 octobre 1991, ne suffisait pas à établir, en l’absence de toute autre circonstance, que le dommage résultait d’un attroupement ou d’un rassemblement au sens de ces dispositions, la cour administrative d’appel de Marseille, dont l’arrêt est suffisamment motivé, n’a pas fait une inexacte application de ces dispositions ;
Considérant, en deuxième lieu, que la responsabilité de l’Etat, qu’elle soit invoquée sur le fondement de la faute ou sur celui du principe d’égalité devant les charges publiques, ne peut, en l’absence de disposition particulière, résulter que d’un fait imputable à l’Etat ; qu’ainsi, en jugeant qu’en l’absence de disposition législative le prévoyant expressément, la responsabilité de l’Etat ne saurait être, de plein droit, engagée sur le fondement du risque du fait d’actes de terrorisme survenus sur le territoire français, la cour n’a commis aucune erreur de droit ;
Considérant, enfin, que si la responsabilité pouvant incomber à l’Etat au titre d’un manquement des services de police dans leur mission de surveillance des installations aéroportuaires, doit être appréciée sur le terrain de la faute simple, la cour administrative d’appel qui, pour écarter l’existence d’une telle faute, s’est fondée sur ce que l’aérodrome de Calvi était entièrement clôturé et qu’aucune menace particulière, dont les services de police auraient été avertis, n’avait été formulée à l’encontre du propriétaire de l’avion, n’a pas entaché son arrêt d’une erreur de qualification juridique des faits ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté sa demande de condamnation de l’Etat ;
Sur l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative
Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer au GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête du GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au GROUPEMENT D’INTERET ECONOMIQUE LA REUNION AERIENNE et au ministre de l’intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales
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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article1564