S’il appartient au juge d’appel de s’assurer, alors même que cette question n’est pas discutée devant lui, que la juridiction dont la décision est contestée a siégé dans une composition conforme aux dispositions législatives ou réglementaires qui déterminent cette composition ainsi qu’aux principes qui gouvernent la mise en oeuvre de ces dispositions et si, par conséquent, l’auteur d’un pourvoi en cassation peut faire valoir que le juge d’appel aurait commis une erreur de droit en ne soulevant pas d’office, au vu des pièces du dossier, le moyen tiré de ce que la juridiction de première instance aurait siégé en méconnaissance des dispositions fixant sa composition, en revanche la conformité de celles-ci aux normes supérieures et en particulier, s’agissant de dispositions législatives, aux traités ou accords internationaux, ne constitue pas une question d’ordre public.
CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 239540
M. M.
Mme de Salins
Rapporteur
Mlle Fombeur
Commissaire du gouvernement
Séance du 22 novembre 2002
Lecture du 6 décembre 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
Sur le rapport de la 1ère sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 30 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Jean M. ; M. M. demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler la décision de la commission centrale d’aide sociale en date du 16 août 2001 rejetant son recours contre la décision du 2 novembre 1998 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Allier a maintenu la décision de la commission d’admission à l’aide sociale de Saint-Pourçain-sur-Sioule du 22 janvier 1998 autorisant la récupération de la somme de 22 333,12 F versée au titre de l’aide sociale à sa mère Mme Barbecot ;
2°) de régler l’affaire au fond en annulant la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Allier du 2 novembre 1998 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l’aide sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de Mme de Salins, Maître des Requêtes,
les observations de Me Choucroy, avocat de M. M.,
les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de l’erreur de droit :
Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 128 du code de la famille et de l’aide sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Allier, et dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 134-2 du code de l’action sociale et des familles : "Un recours peut être formé devant la commission départementale contre les décisions des commissions d’admission (...)" ; que, selon les dispositions des deuxième à cinquième alinéas du même article 128, ultérieurement codifiées à l’article L. 134-6 du code de l’action sociale et des familles : "La commission départementale (...) est présidée par le président du tribunal de grande instance du chef lieu ou le magistrat désigné par lui pour le remplacer. Elle comprend, en outre : / - Trois conseillers généraux élus par le conseil général ; / - Trois fonctionnaires de l’Etat en activité ou à la retraite désignés par le représentant de l’Etat dans le département. / En cas d’égal partage des voix, le président a voix prépondérante." ;
Considérant que s’il appartient au juge d’appel de s’assurer, alors même que cette question n’est pas discutée devant lui, que la juridiction dont la décision est contestée a siégé dans une composition conforme aux dispositions législatives ou réglementaires qui déterminent cette composition ainsi qu’aux principes qui gouvernent la mise en oeuvre de ces dispositions et si, par conséquent, l’auteur d’un pourvoi en cassation peut faire valoir que le juge d’appel aurait commis une erreur de droit en ne soulevant pas d’office, au vu des pièces du dossier, le moyen tiré de ce que la juridiction de première instance aurait siégé en méconnaissance des dispositions fixant sa composition, en revanche la conformité de celles-ci aux normes supérieures et en particulier, s’agissant de dispositions législatives, aux traités ou accords internationaux, ne constitue pas une question d’ordre public ;
Considérant, d’une part, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond et qu’il n’est d’ailleurs pas soutenu que la commission départementale d’aide sociale de l’Allier ait statué sur la demande de M. M. dans une composition irrégulière au regard des dispositions précitées de l’article 128 du code de la famille et de l’aide sociale ; que, d’autre part, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de ce que la commission centrale d’aide sociale aurait commis une erreur de droit en s’abstenant de soulever d’office un moyen tiré de la non-conformité des dispositions de l’article 128 du code de la famille et de l’aide sociale au regard des stipulations de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut qu’être écarté ;
Sur le moyen tiré de la dénaturation :
Considérant qu’aux termes de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, issu de la loi du 24 janvier 1997 en vigueur à la date du 27 mars 1997 à laquelle Mme Barbecot, mère de M. M., a été admise au bénéfice de l’allocation compensatrice pour tierce personne, et dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles : "Des recours sont exercés par le département (...) : (...) b) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande (...)" ;
Considérant qu’en décidant de maintenir à 22 333,12 F (3 404,66 euros) le montant des sommes à récupérer au titre de l’aide sociale, en application des dispositions précitées de l’article 146 du code de la famille et de l’aide sociale, sur M. M. en sa qualité de bénéficiaire d’une donation de la part de sa mère, la commission centrale d’aide sociale a porté sur les pièces du dossier soumises à son examen une appréciation exempte de toute dénaturation ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la requête de M. M. doit être rejetée ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. M. est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean M., au département de l’Allier et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article1438