Conseil d’Etat, 14 octobre 2002, n° 244714, Commune du Lavandou

Si, dans le cas d’une décision de rejet, il appartient au juge des référés, même en l’absence de conclusions expresses, d’assortir la mesure de suspension de l’indication des obligations qui en découleront pour l’administration, la circonstance qu’il se soit borné à prononcer la suspension de la décision de rejet sans mentionner lesdites obligations, alors qu’il n’était pas saisi de conclusions en ce sens, n’est pas de nature à entacher d’irrégularité l’ordonnance attaquée.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 244714

COMMUNE DU LAVANDOU

Mme Guilhemsans
Rapporteur

M. Goulard
Commissaire du gouvernement

Séance du 30 septembre 2002
Lecture du 14 octobre 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 avril et 17 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la COMMUNE DU LAVANDOU, représentée par son maire ; la COMMUNE DU LAVANDOU demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance en date du 20 février 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, à la demande de l’Eurl "GB", suspendu l’exécution de l’arrêté en date du 5 novembre 2001 par lequel le maire de ladite commune a refusé de lui délivrer un permis de construire pour 12 logements, des parkings et des locaux commerciaux ;

2°) de condamner l’Eurl "GB" à lui verser la somme de 3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la COMMUNE DU LAVANDOU et de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de l’Eurl "GB",
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l’ordonnance en date du 20 février 2002, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, à la demande de l’Eurl "GB", suspendu l’exécution de l’arrêté en date du 5 novembre 2001 par lequel le maire de la COMMUNE DU LAVANDOU a refusé de lui délivrer un permis de construire pour 12 logements, des parkings et des locaux commerciaux ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre ’à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ;

Sur la régularité de l’ordonnance attaquée :

Considérant que le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-1 précité du code de justice administrative, la suspension d’une décision administrative ou de certains de ses effets si, d’une part, l’urgence le justifie et d’autre part, l’un des moyens paraît, en l’état de l’instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; que si, dans le cas d’une décision de rejet, il appartient au juge des référés, même en l’absence de conclusions expresses, d’assortir la mesure de suspension de l’indication des obligations qui en découleront pour l’administration, la circonstance qu’il se soit borné, en l’espèce, à prononcer la suspension de la décision de rejet sans mentionner lesdites obligations, alors qu’il n’était pas saisi de conclusions en ce sens, n’est pas de nature à entacher d’irrégularité l’ordonnance attaquée ;

Sur la demande de suspension :

Considérant que l’article UA9 du plan d’occupation des sols de la COMMUNE DU LAVANDOU prévoit que l’emprise au sol "peut être de 100 % dans la bande des 15 m mesurés depuis l’alignement ou retrait imposé de la voie publique, ou de la limite qui s’y substitue pour les voies privées. Elle ne peut être supérieure à 50 % au-delà de cette bande de 15 mètres" ; qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le projet envisagé par l’Eurl "GB", qui comporte des parkings entièrement souterrains, recouverts d’une terrasse plantée respectant la pente naturelle du terrain, a été refusé par le maire du Lavandou au motif que les parkings enterrés constituaient une emprise au sol qui excède les 50 % autorisés par cet article ;

Considérant qu’en retenant, pour suspendre la décision rejetant la demande de permis de construire, que le moyen tiré de l’illégalité de ce motif était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, le juge des référés n’a pas entaché son ordonnance d’une erreur de droit ou dénaturé les faits, notamment dans l’appréciation du niveau du sol ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761 du code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de, justice administrative font obstacle à ce que l’Eurl "GB", qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la COMMUNE DU LAVANDOU la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner la COMMUNE DU LAVANDOU à payer à l’Eurl "GB" la somme de 2 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DU LAVANDOU est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DU LAVANDOU paiera à l’Eurl "GB" la somme de 2 300 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DU LAVANDOU et à l’Eurl "GB".

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