Conseil d’Etat, 18 octobre 2002, n° 222544, Conseil départemental de l’ordre des médecins de l’oise

La situation d’un médecin au regard de la convention nationale conclue entre les organisations représentatives de médecins et les organismes de sécurité sociale fait partie des conditions d’exercice de l’activité susceptibles d’être prises en compte lors de l’examen d’une demande d’exemption du tour de garde. Si la circonstance qu’un médecin n’a pas adhéré à cette convention n’est pas de nature à justifier dans tous les cas qu’il soit exempté de l’obligation de participer au service de garde, le conseil départemental de l’Ordre des médecins peut légalement prendre en considération, dans l’appréciation individuelle des demandes, cette situation qui peut avoir une incidence sur l’accès au service de garde en dissuadant certains patients d’y recourir.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 222544

CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE

M. Molina
Rapporteur

M. Schwartz
Commissaire du gouvernement

Séance du 25 septembre 2002
Lecture du 18 octobre 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 6ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 28 juin 2000 et le 13 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE, dont le siège est 1, rue de la Porte Nointel à Clermont (60600) ; le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE demande au Conseil d’Etat l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 13 avril 2000 par laquelle le CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS a annulé sa décision du 17 novembre 1999 exemptant de son obligation de garde, Mme Anne-Marie B. ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Molina, Auditeur,
- les observations de la SCP Bouzidi, avocat du CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l’Ordre des médecins,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu’aux termes de l’article 77 du décret du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale : "Dans le cadre de la permanence des soins, c’est un devoir pour tout médecin de participer aux services de garde de jour et de nuit. Le conseil départemental de l’Ordre peut néanmoins accorder des exemptions, compte tenu de l’âge du médecin, de son état de santé, et, éventuellement, de ses conditions d’exercice" ; que la situation d’un médecin au regard de la convention nationale conclue entre les organisations représentatives de médecins et les organismes de sécurité sociale fait partie des conditions d’exercice de l’activité susceptibles d’être prises en compte lors de l’examen d’une demande d’exemption du tour de garde ; que si la circonstance qu’un médecin n’a pas adhéré à cette convention n’est pas de nature à justifier dans tous les cas qu’il soit exempté de l’obligation de participer au service de garde, le conseil départemental de l’Ordre des médecins peut légalement prendre en considération, dans l’appréciation individuelle des demandes, cette situation qui peut avoir une incidence sur l’accès au service de garde en dissuadant certains patients d’y recourir ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme B. n’a pas adhéré à la convention nationale des médecins ; qu’en estimant par la décision attaquée que "la situation du Dr. Becquet au regard de la convention ne constitue pas une condition d’exercice de nature à justifier une exemption du tour de garde" sans rechercher si, dans les circonstances de l’espèce, cette situation n’était pas de nature à porter atteinte à la qualité du service de garde, le Conseil national de l’Ordre des médecins a entaché sa décision d’une erreur de droit ; qu’il suit de là que le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE est fondé à demander l’annulation de la décision par laquelle le Conseil national de l’Ordre des médecins a annulé sa décision du 17 novembre 1999 exemptant de son obligation de garde, Mme B., médecin non conventionné, et a refusé l’exemption sollicitée ;

Sur les conclusions présentées pour le Conseil national de l’ordre des médecin : tendant à faire application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE, qui n’est pas la partie perdante, soit condamné à verser au Conseil national de l’Ordre des médecins la somme qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 13 avril 2000 du Conseil national de l’Ordre des médecins refusant d’exempter Mme B. de l’obligation de participer au service de garde est annulée.

Article 2 : Les conclusions du Conseil national de l’Ordre des médecins tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L’ORDRE DES MEDECINS DE L’OISE, au Conseil national de l’Ordre des médecins, à Mme Anne-Marie B., à M. Hervé Berche et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article1310