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19 février 2002

Le pouvoir règlementaire et l’obligation de recourir au ministère d’avocat devant les juridictions administratives

Par un arrêt en date du 21 décembre 2001 (M. Hofmann, n° 222862), le Conseil d’Etat a eu à statuer sur la légalité - au regard des principes à valeur constitutionnelle, des principes généraux du droit et des ceux issus des engagements internationaux - de l’obligation imposée aux requérants de recourir au ministère d’avocat devant les juridictions administratives.

Le décret n° 2000-389 du 4 mai 2000 est venu modifier, dans le cadre de la réforme procédurale devant les juridictions administratives, la partie réglementaire du nouveau Code de justice administrative. Dans le cadre de ces réformes, le nouveau code de procédure administrative prévoit le recours obligatoire pour les requérants au ministère d’avocat voire, à un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation.

Ainsi l’article R. 431-2 du Code de justice administrative précise par exemple que "les requêtes et les mémoires doivent, à peine d’irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, soit par un avoué en exercice dans le ressort du tribunal administratif intéressé, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d’une somme d’argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d’un litige né d’un contrat".

Mécontents d’une telle obligation, des requérants ont saisi le Conseil d’Etat aux fins de voir annuler les dispositions du décret du 4 mai 2000 et ceci en se fondant pêle-mêle sur les dispositions et principes constitutionnels, la Convention européenne des droits de l’homme ou le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Appelé tout d’abord sur la compétence du pouvoir réglementaire pour élaborer les règles de représentation devant les juridictions administratives, le juge suprême a estimé qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution, le législateur est compétent pour fixer les règles concernant la procédure pénale, la création de nouveaux ordres de juridiction ou les modalités de recouvrement des impositions de toute nature. Ainsi, "les dispositions de la procédure à suivre devant les juridictions administratives relèvent de la compétence réglementaire dès lors qu’elles ne mettent en cause aucune des matières réservées au législateur" par des normes de valeur constitutionnelle.

Sur le fond, le Conseil d’Etat - aux termes d’un considérant de principe - énonce que "dans l’exercice de sa compétence, le pouvoir réglementaire doit se conformer tout à la fois aux règles et principes de valeur constitutionnelle, aux principes généraux du droit ainsi qu’aux engagements internationaux introduits dans l’ordre juridique interne". En guise de préambule, il est loisible de s’interroger sur le choix pris par le Conseil d’Etat dans l’énumération des normes. Faut-il y voir le nouveau dessin d’une hiérarchie des normes où les engagements internationaux seraient secondaires par rapport aux principes généraux du droit. Sans doute pas ...

Après avoir énoncé les normes de références, le Conseil d’Etat a fait application de ces principes au cas particulier de la représentation (ou de l’obligation de représentation devant les juridictions administratives). Il relève tout d’abord qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, "toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée n’a point de Constitution". Pour le juge administratif, cet article "implique le droit pour les personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction". Il transpose ici, la solution retenue à diverses reprises par le Conseil constitutionnel. En conséquence, le pouvoir réglementaire ne saurait porter atteinte à la substance même de ce principe à valeur constitutionnelle. En l’espèce, le juge retient que le décret a pour objet d’assurer aux justiciables la qualité de leur défense et de concourir à une bonne administration de la justice en imposant, dans certaines conditions, le recours à des mandataires professionnels offrant des garanties de compétence.

D’autre part, le juge retient que la circonstance que l’Etat est dispensé devant les juridictions administratives du ministère d’avocat "n’est contraire ni au principe d’égalité devant la loi, ni au principe d’égalité devant la justice, dès lors qu’en raison tant de sa position de défendeur dans les instances où il est mis en cause que du fait qu’il dispose de services juridiques spécialisés, l’Etat se trouve dans une situation différente de celles des autres justiciables".

Le Conseil d’Etat écarte donc sur le même fondement, les prétentions des requérants fondées sur l’article 14 de la Convention européenne qui prohibe toute discrimination dans la mise en oeuvre des droits garantis par la Convention et notamment, le droit à un procès équitable et, le droit d’accès au juge. Une précision néanmoins au regard de la CEDH, l’article 6 énonce dans son paragraphe 3 le droit de tout accusé de se défendre lui-même. Le juge administration rappelle à juste titre que cette disposition ne s’applique uniquement dans la matière pénale. Or, en matière de contravention de grande voirie, le juge administratif est compétent. Le Conseil d’Etat écarte l’argument en relevant que l’obligation de représentation est en fait une exception au principe posé par le Code de justice administratif selon lequel les recours contre les jugements des tribunaux administratifs rendus dans cette matière peuvent avoir lieu sans l’intervention d’un avocat. (BT)

 


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