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30 janvier 2002

L’urgence s’apprécie au regard de chacun des éléments composant une sanction

Dans une ordonnance de référé en date du 24 janvier 2002 (M. David Hannoun, n° 240717, à paraître), le juge des référés a apporté des précisions quant à l’appréciation de la condition d’urgence. Dès lors qu’un requérant demande au juge administratif la suspension d’un acte infligeant deux sanctions, le juge appréciera la condition d’urgence au regard de chacune des sanctions.

Par une décision du 26 septembre 2001, le Conseil des marchés financiers a infligé à M. Hannoun, alors dirigeant du département "vente de produits dérivés et convertibles" de la société Crédit agricole Indosuez Cheuvreux, une sanction à la suite d’une procédure disciplinaire. Cette sanction comportait d’une part le retrait pour une durée de cinq ans de la carte professionnelle de la personne, et, d’autre part, une sanction pécuniaire de 3.719.756 euros (24,4 millions de francs).

Le requérant a saisi en référé le juge administratif afin d’obtenir la suspension de la décision. Le Conseil d’Etat relève tout d’abord qu’aux termes de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative, "Quand une décision administrative (...) fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre de créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision".

Examinant chacun des critères, le Conseil d’Etat relève à propos du moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision que le Conseil des marchés financiers s’est référé exclusivement aux articles 3-1-1, 3-3-1, 3-3-2, 3-3-6 et 4-1-31 du règlement général du CMF homologué par un arrêté ministériel du 29 juillet 1998 pour sanctionner M. Hannoun alors qu’à la date des faits, ces articles ne présentent les règles qu’ils édictent, précisent ou rappellent que comme si elles étaient relatives aux seuls prestataires de services d’investissement.

Ainsi, aux termes de l’ordonnance du Conseil d’Etat, le Conseil des marchés financiers ne pouvait prima facie se fonder sur ces dispositions qui "ne sauraient légalement être invoqués à l’encontre des collaborateurs ou préposés de ces prestataires" de services d’investissement.

Après avoir analysé la condition du doute sérieux sur la légalité, le juge administratif s’est penché sur la question de l’urgence. Pour apprécier cette seconde condition, le juge a tenu à l’analyser selon chacun des éléments composant la sanction.

D’une part, il a relevé que "la sanction pécuniaire prononcée à l’encontre de M. Hannoun préjudicie à la situation de celui-ci d’une façon qui conduit à tenir la condition relative à l’urgence comme satisfaite en ce qui concerne les conclusions tendant à la suspension de ceux des effets de la décision du 26 septembre 2001 tenant à cette sanction pécuniaire".

D’autre part, il estime qu’eu égard à la gravité des manquements reprochés au requérant, et aux considérations d’intérêt général relatives à la loyauté du marché et à la protection des épargnants et investisseurs en vue desquelles le législateur a prévu que les personnes placées sous l’autorité ou agissant pour le compte des prestataires de services d’investissement peuvent à raison des manquements à leurs obligations professionnelles définies par les lois et règlement en vigueur se voir retirer leur carte professionnelle par le Conseil des marchés financiers, "la condition d’urgence ne peut être regardée comme remplie s’agissant du retrait de la carte professionnelle".

En conséquence, le Conseil d’Etat a prononcé la suspension de la décision du Conseil des marchés financiers uniquement en tant qu’elle comporte une sanction pécuniaire. Les autres éléments de la décision (le retrait de la carte professionnelle) sont toujours applicables.

Cette décision donne une nouvelle fois une approche objective de l’appréciation de l’urgence. Le juge décortiquera systématiquement les décisions dont la suspension est demandée afin de déterminer les éléments remplissant la condition d’urgence, et les autres. Comme l’indique le Vice-président du Conseil d’Etat, Renaud Denoix de Saint-Marc dans une tribune publié dans le numéro du mois de janvier 2002 de l’AJDA, "l’urgence est la clé des nouvelles procédures. Le Conseil d’Etat est et demeurera exigeant sur ce point. Le juge administratif ne doit pas se laisser gagner à la main. L’urgence est appréciée globalement et objectivement, compte tenu de l’ensemble des circonstances de chaque affaire. En particulier, les exigences du service public et, plus encore, celles de l’ordre public doivent être prises en considération. L’impatience d’un requérant ne crée pas l’urgence, ni sa trop longue temporisation à l’égard des agissements administratif dont il se plaint". Entre ces remarques et l’ordonnance du 24 janvier 2002, un pas a quand même été franchi : l’urgence ne s’apprécie plus globalement, mais bien minutieusement. (BT)

 


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