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9 janvier 2002

Le médecin peut-il prêter son concours à la réalisation d’une opération de "testing" chez des pharmaciens ?

Par une décision en date du 21 décembre 2001 (affaire Dio, n° 215316), le Conseil d’Etat a statué sur la possibilité pour un médecin de prêter son concours à la réalisation d’une opération tendant à tester la vigilance des pharmaciens. Le juge a refusé d’y reconnaître une quelconque faute de nature à entraîner une sanction disciplinaire.

L’Union fédérale des consommateurs UFC-Que choisir avait décidé de mener une enquête pour son mensuel papier sur la vigilance des pharmaciens lors de la délivrance des médicaments prescrits par les médecins. En effet, aux termes de l’article R. 5015-48 du Code de la santé publique, "le pharmacien doit assurer dans son intégralité l’acte de dispensation du médicament, associant à sa délivrance (...) l’analyse pharmaceutique de l’ordonnance médicale si elle existe". Ainsi, selon l’article R. 5015-60 du même code, "lorsque l’intérêt de la santé du patient lui parait l’exiger, le pharmacien doit refuser de dispenser un médicament.".

Pour réaliser cette enquête, l’UFC Que Choisir a demandé à un médecin de rédiger des ordonnances destinées à des patients fictifs et comportant des prescriptions volontairement erronées. Les enquêteurs de l’UFC Que Choisir ont ainsi pu présenter ces ordonnances à une centaine d’officines de pharmacie.

A la suite de ces prescriptions, la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins a infligé un blâme au médecin en se fondant sur l’absence de consultation des pairs et de l’autorité ordinale, et que "la faute était de nature à déconsidérer la profession". Saisi en qualité de juge de cassation, le Conseil d’Etat a annulé les décisions prises par les juridictions ordinales.

Tout d’abord d’un point de vue purement procédural, il a relevé que seul le conseil départemental au tableau duquel est inscrite la personne concernée peut saisir le conseil régional de l’Ordre. Ainsi, la plainte ne pouvait émaner que du conseil départemental dont relève la personne. En l’espèce, le conseil départemental du Calvados ne pouvait adresser aucune plainte au conseil régional d’Ile de France. Seul le conseil département de Seine-Saint-Denis le pouvait en l’espèce.

Sur le fond de l’affaire, le Conseil d’Etat a très laconiquement estimé que "les faits reprochés (au requérant) ne sont pas constitutifs d’une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire". Ainsi, le juge a annulé le blâme prononcé par les juridictions ordinales.

La solution est assez intéressante notamment quand on la met sur le même plan que celle adoptée le 29 décembre 2000 à propos du docteur Gubler. Dans cette décision, le juge administratif a confirmé les sanctions prononcées à l’encontre du médecin d’un ancien chef d’Etat qui avait réalisé de faux bulletins de santé. Le Conseil d’Etat a relevé précisément qu’en "estimant que la circonstance que M. Gubler aurait ainsi agi pour se conformer à la demande expresse du Président de la République et en considération de la « raison d’État », n’était pas de nature à l’autoriser à aliéner son indépendance professionnelle, la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins n’a pas méconnu les dispositions précitées du code de déontologie médicale".

La confirmation de la sanction prononcée à l’encontre du médecin était donc fondé sur la perte de l’indépendance professionnelle. En effet, le Code de déontologie des médecins précise expressément dans son article 5 que "le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit".

Dans l’affaire Dio, les faits étaient assez proches. Le médecin avait réalisé non pas des faux bulletins de santé, mais des fausses ordonnances afin de participer à une enquête de l’UFC Que Choisir. La solution du juge administratif aurait donc dû être la même. En conséquence, nous trouvons-nous devant un revirement ? Sans doute pas. Le Conseil d’Etat a dû prendre en compte un élément supplémentaire. En effet, dans les commentaires de l’article 5 réalisés par le Conseil national de l’ordre des médecins, on peut lire que "Le médecin doit toujours agir dans le sens dicté par l’intérêt premier du patient et ne peut pas se laisser considérer comme un agent d’exécution au service d’autres intérêts qui deviendraient prépondérants".

En l’espèce, l’enquête avait un but précis : apprécier le non-respect par des pharmaciens de leur obligation de vigilance. Ce but au final avait lui-même un objectif : l’intérêt du patient. En conséquence, il se pourrait que le juge ait admis une telle participation de la part du médecin car celle-ci s’inscrivait dans la protection de l’intérêt du patient. (BT)

 


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