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4 décembre 2001

L’exercice du pouvoir gouvernemental d’opposition à l’acquisition de la nationalité

Dans une décision en date du 7 novembre 2001 (Mme Mateo Valerio - à paraître), le Conseil d’Etat a eu l’occasion de contrôler un décret du Gouvernement pris sur le fondement de l’article 21-4 du Code civil, donnant un pouvoir d’opposition d’acquisition de la nationalité par le mariage.

L’article 21-4 du Code civil dispose que "Le gouvernement peut s’opposer, par décret en Conseil d’Etat, pour indignité ou défaut d’assimilation, à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger". En cas d’opposition du Gouvernement, l’intéressé est réputé n’avoir jamais acquis la nationalité française.

Deux critères sont donc retenus pour fonder une telle opposition : l’indignité du déclarant et le défaut d’assimilation. La jurisprudence administrative a permis de délimiter les contours de ces deux critères.

En ce qui concerne l’opposition pour indignité du déclarant, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de juger une affaire (CE, 25 septembre 1996, Kazkaz) où pour s’opposer sur le fondement de l’article 21-4 du code civil, pour indignité, à l’acquisition de la nationalité française par le requérant, les auteurs du décret attaqué se sont fondés sur la gravité des faits à raison desquels l’intéressé a fait l’objet d’une inculpation, notamment pour complicité d’empoisonnement. Le juge a validé cette décision au motif que "le principe de la présomption d’innocence énoncé à l’article 9 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne faisait pas obstacle à ce que M K fût regardé comme indigne alors même que la procédure d’instruction n’était pas achevée et qu’aucune juridiction de jugement ne s’était encore prononcée sur son cas.".

En ce qui concerne l’opposition pour refus d’assimilation, la jurisprudence administrative est plus prolixe. En effet, certains critères ont été utilisés par le Gouvernement, puis invalidés par le juge administratif comme ceux fondés sur les simples pratiques religieuses. Ainsi, le juge administratif suprême a indiqué que "la circonstance que le requérant s’affirme comme un musulman croyant et de stricte observance et a épousé une Française qui est elle-même de religion musulmane et porte le voile islamique n’est pas de nature à révéler, à elle seule, un défaut d’assimilation" (CE, 19 novembre 1997, Ben Halima).

A l’opposé, le juge a validé l’opposition formulée par le Gouvernement à l’encontre d’une "personne qui était à l’époque l’un des principaux dirigeants d’une fédération à laquelle étaient affiliés plusieurs mouvements extrémistes prônant le rejet des valeurs essentielles de la société française" (CE, 7 juin 1999, Ben Mansour), ou d’un "ressortissant algérien marié à une Française, militant actif d’un mouvement extrémiste, et qui répandait dans sa région, notamment au sein de la mosquée d’Angers, des thèses manifestant un rejet des valeurs essentielles de la société française" (CE, 14 octobre 1998, Amiour). En l’espèce, les pratiques consistant à rejeter les valeurs essentielles de la société française ont fondé ces décisions.

Dans la présente affaire, le juge administratif a franchi une étape supplémentaire. Il s’agissait d’une ressortissante dominicaine "qui réside en Guyane depuis 1990, comprend et parle très peu le français, qu’elle ne sait ni lire ni écrire, et qu’elle ne peut soutenir une conversation courante en français". Alors même que la requérante parle couramment le créole, habituellement utilisé en Guyane, le juge a estimé que le ministre de l’emploi et de la solidarité pouvait légalement s’opposer à l’acquisition de la nationalité par mariage "en estimant qu’elle témoignait d’une assimilation insuffisante à la communauté française".

Il s’agit du premier cas d’opposition pour insuffisance d’assimilation fondé sur les barrières linguistiques. On peut critiquer la solution retenue puisque l’intéressée parlait couramment le créole, langue habituellement utilisée en Guyane. Seulement, c’est sans doute l’absence de reconnaissance officielle de cette seconde langue, et l’existence du principe d’unité de la République - et par la même d’unité de la langue - qui a joué en la défaveur de la requérante. La solution aurait-elle été identique dans le cas d’un requérant, s’installant en Nouvelle-Calédonie, et ne parlant que le kanak ? Sur le fondement des accords de Nouméa, peut-être pas. (BT)

 


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