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Conseil d’Etat, Avis, 29 avril 2002, n° 241560, Société l’Exotique

La définition d’un régime de protection de l’exploitation des oeuvres cinématographiques en salles par l’instauration d’un délai avant que ces oeuvres puissent être commercialisées sous forme de supports vidéocassettes et vidéodisques n’entre pas dans le domaine de la communication audiovisuelle.

CONSEIL D’ETAT

N° 241560

SOCIETE L’EXOTIQUE

M. Herondart, Rapporteur

Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement

Séance du 3 avril 2002

Lecture du 29 avril 2002

REPUBLIQUE FRANÇAISE

Le Conseil d’Etat (Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la Section du contentieux

Vu, enregistré le 2 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le jugement du 27 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, avant de statuer sur la requête de la SARL L’EXOTIQUE tendant à l’appréciation de la légalité de la délibération n° 40-98/APS du 18 novembre 1998 de l’assemblée de la province sud relative à la protection des oeuvres cinématographiques, a transmis, en application de l’article 205 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, les dossiers de ces demandes au Conseil d’Etat en soumettant à son examen la question de savoir quelles sont les autorités compétentes en matière de protection des oeuvres cinématographiques en Nouvelle-Calédonie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la loi modifiée n° 88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Herondart, Auditeur,
- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

REND L’AVIS SUIVANT

Aux termes de l’article 204 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : "I. - Les actes (...) de l’assemblée de province, de son bureau et de son président mentionnés au II sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie ou à leur notification aux intéressés, ainsi qu’à leur transmission au haut-commissaire ou à son représentant dans la province, par le président du congrès, par le président du sénat coutumier ou par le président de l’assemblée de province. (...) / II. - Sont soumis aux dispositions du I les actes suivants : (...) D. - Pour les assemblées de province : 1° Leurs délibérations (...)". Aux termes de l’article 205 de la même loi : "Lorsque le tribunal administratif est saisi d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre les actes mentionnés aux (...) 1° à 3° du D du II de l’article 204 et que ce recours est fondé sur un moyen sérieux invoquant l’inexacte application de la répartition des compétences entre l’Etat , la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes ou que ce moyen est soulevé d’office, il transmet le dossier sans délai pour avis au Conseil d’Etat, par un jugement qui n’est susceptible d’aucun recours. Le Conseil d’Etat examine la question soulevée dans un délai de trois mois et il est sursis à toute décision sur le fond jusqu’à son avis ou, à défaut, jusqu’à l’expiration de ce délai. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de la publication de l’avis au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie ou de l’expiration du délai imparti au Conseil d’Etat."

En application de ces dispositions, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a sursis à toute décision au fond sur la demande de la SARL L’EXOTIQUE, présentée à la suite d’une question préjudicielle posée le 12 juillet 2001 par la cour d’appel de Nouméa et tendant à ce que la délibération n° 40-98/APS du 18 novembre 1998 de l’assemblée de la province sud de la Nouvelle-Calédonie relative à la protection des oeuvres cinématographiques soit déclarée illégale, et a transmis le dossier au Conseil d’Etat en lui posant la question de la légalité de la délibération de la province sud du 18 novembre 1998 au regard de la répartition des compétences entre l’Etat et les différentes institutions de la Nouvelle-Calédonie concernant la protection des oeuvres cinématographiques en Nouvelle-Calédonie.

La délibération dont il est demandé au Conseil d`Etat d’apprécier la légalité prévoit que dans la province sud, aucune oeuvre cinématographique exploitée dans les salles de cinéma ne peut faire l’objet d’une exploitation simultanée sous forme de supports destinés à la vente ou à la location pour l’usage privé du public et notamment sous forme de vidéocassettes et de vidéodisques avant l’expiration du délai de protection d’un an en vigueur en métropole.

La société requérante invoque l’incompétence de l’assemblée de la province Sud pour prendre cette délibération au regard des compétences de la Nouvelle-Calédonie en matière de concurrence et des compétences de l’Etat en matière de communication audiovisuelle, tant à la date à laquelle la délibération a été prise qu’à la date où le juge des référés du tribunal mixte de commerce de Nouméa a fait application de cette délibération. La modification de la répartition des compétences entre l’Etat , la Nouvelle-Calédonie et les provinces par la loi organique du 13 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ne peut néanmoins être regardée comme un changement dans les circonstances de droit qui pourrait rendre illégale la délibération litigieuse. Le Conseil Mat doit apprécier la compétence de l’assemblée de la province sud pour prendre cette délibération au regard de la répartition des compétences telle qu’elle a été fixée par les dispositions de la loi du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998, en vigueur à la date de la délibération litigieuse.

L’article 7 de la loi du 9 novembre 1988 dispose que chaque province est compétente dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l’Etat ou au territoire de la Nouvelle-Calédonie ou aux communes par la législation applicable en Nouvelle-Calédonie.

La communication audiovisuelle est une compétence reconnue à l’Etat en application des dispositions du 19° de l’article 9 de la loi du 9 novembre 1988. La communication audiovisuelle suppose l’utilisation d’un procédé de télécommunication. La diffusion des oeuvres cinématographiques et la mise à disposition du public de telles oeuvres sous forme de supports vidéocassettes et vidéodisques ne met en jeu aucun procédé de télécommunication. La circonstance que certaines règles relatives à cette diffusion ont été définies par la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle ne saurait les faire entrer dans le champ de la communication audiovisuelle. Dès lors, la définition d’un régime de protection de l’exploitation des oeuvres cinématographiques en salles par l’instauration d’un délai avant que ces oeuvres puissent être commercialisées sous forme de supports vidéocassettes et vidéodisques n’entre pas dans le domaine de la communication audiovisuelle. La délibération de l’assemblée de la province sud n’est donc pas intervenue dans une matière relevant de la compétence de l’Etat.

Aux termes des 9° et 10° de la loi du 9 novembre 1988, le territoire est compétent en matière de contrôle des poids et des mesures, de répression des fraudes et de réglementation des prix. La définition d’un régime de protection de l’exploitation des oeuvres cinématographiques dans les salles ne peut être regardée comme intervenant dans ces domaines.

Aussi la province sud était-elle compétente pour prendre la délibération litigieuse.

Le présent avis sera notifié au président du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, à la SARL L’EXOTIQUE, au président de la province sud de la Nouvelle-Calédonie, au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et au secrétaire d’Etat à l’outre-mer.

Il sera publié au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie.

 


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