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La compétence préfectorale en matière de suppression du sectionnement électoral

Par Benoît TABAKA
Chargé d’enseignements à l’Université de Paris V - René Descartes et Paris X - Nanterre

Les opinions exprimées dans cet article sont uniquement celles de l’auteur et ne sauraient engager la responsabilité de son employeur.

Le préfet ne tire d’aucune disposition législative le pouvoir de supprimer le sectionnement électoral, même en cas de carence du conseil général.

Par une décision du 21 janvier 2002 (Elections municipales d’Utelle), le Conseil d’Etat est venu préciser les pouvoirs du préfet en matière de modification ou de suppresion du sectionnement électoral mis en place par le conseil général sur le fondement de l’article L. 255 du Code électoral.

Aux termes de l’article L. 254 du Code électoral, "l’élection des membres du conseil municipal a lieu au scrutin de liste pour toute la commne. Néanmoins, la commune peut être divisée en sections électorales, donc chacune élit un nombre de conseillers proportiuonné au chiffre des électeurs inscrits, mais seulement, quand elle se compose de plusieurs agglomérations d’habitants distinctes et séparées ; aucune section ne peut avoir moins de deux conseillers à élire".

L’article L. 255 précise quant à lui, que le sectionnement électoral est organisé exclusivement par le conseil général sur la proposition de l’un se ses membres, du préfet, du conseil municipal ou d’électeurs de la commune. Cette décision du conseil général doit être précédée d’un délai de six mois durant lequel l’institution organise une enquête publique sur le territoire communal.

En l’espèce, une commune de moins de 3.500 habitants avait fait l’objet d’un sectionnement en quatres sections. Le préfet des Alpes-Maritimes a néanmoins estimé que, compte tenu du nombre de conseillers municipaux à élire en vertu de l’article L. 2121-5 du Code général des collectivités territoriales, le nombre d’inscrits dans l’une des 4 sections n’était plus théoriquement suffisant pour permettre à cette section d’avoir droit à au moins deux élus conformément à l’article L. 254 du Code électoral. Le Conseil d’Etat avait eu déjà l’occasion d’indiquer au cours des années 1920 que le sectionnement électoral doit permettre l’élection d’au moins deux conseillers (CE, 2 août 1927, Elections de Montpeyroux ; CE, 9 mars 1929, Commune de Marignana). En conséquence, et sans doute poussé par sa fougue règlementaire, le préfet a décidé unilatéralement et à quelques jours du scrutin de supprimer la section minoritaire et de la rattacher à la section la plus proche géographiquement.

Un réquérant a saisi le juge électoral de ce changement en estimant qu’il avait été de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin. Le Conseil d’Etat s’est déclaré, tout d’abord, compétent pour appréciser la légalité de la décision préfectorale de suppresion d’une des quatre sections et notamment pour apprécier l’impact de cette décision sur la légalité du scrutin.

Sur le fond, les juges du Palais Royal relèvent qu’aucune "disposition législative ne prévoit la suppression de plein droit d’une section électorale au cas où une section préexistante viendrait à avoir moins de deux conseillers à élire". En outre, seul le conseil général détient le pouvoir de modifier le sectionnement et, en cas de négligence pour dresser le tableau des opérations de sectionnement au cours du dernier trimestre de l’année, le préfet n’a aucun pouvoir pour "se substituer au président du Conseil général, en supprimant une section quelques jours seulement avant le scrutin et en totale méconnaissance de la procédure de modification des sectionnements prévue par les dispositions du code électoral". Ainsi, le Conseil d’Etat estimant que les opérations électorales avaient été viciées dans leur ensemble, a annulé dans son intégralité les élections municipales.

Cette décision vient compléter la très rare jurisprudence relative au sectionnement électoral. En effet, une unique poignée de décisions avait commencé à dessiner le cadre juridique de cette procédure exceptionnelle. Au début du XXème siècle, le Conseil d’Etat avait ainsi estimé que l’enquête préalable pouvait ne durer que six heures et être annoncée 10 jours à l’avance dès lors que les intéressés auraient pu faire valoir leurs observations (CE, 17 avril 1929, n° 8069, Cheynel).

© - Tous droits réservés - Benoît TABAKA - 14 juin 2002

 


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