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Conseil d’Etat, 3 septembre 2008, n° 283315, Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/ Société Euro-Sérum

Ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d’éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l’une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l’année d’imposition concernée ; qu’aux termes de l’article 38 quater de l’annexe III au code général des impôts : "Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de l’impôt."

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 283315

MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ Société Euro-Sérum

Mme Karin Ciavaldini
Rapporteur

M. Pierre Collin
Commissaire du gouvernement

Séance du 11 juin 2008
Lecture du 3 septembre 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 9ème et 10ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 9ème sous-section de la Section du contentieux

Vu le pourvoi du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE, enregistré le 1er août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 9 juin 2005 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l’annulation de l’article 1er du jugement du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Besançon accordant à la société Euro-Sérum une réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 et 1999 dans les rôles des communes de Port-sur-Saône (Haute-Saône) et de Saint-Martin-Belle-Roche (Saône-et-Loire) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Euroserum,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Euro-Sérum a demandé le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, en application de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 1997 dans les rôles de la commune de Port-sur-Saône (Haute-Saône) et au titre de l’année 1999 dans les rôles de cette commune et dans ceux de la commune de Saint-Martin-Belle-Roche (Saône-et-Loire) ; que l’administration n’a accueilli que partiellement sa demande, compte tenu de la majoration par le service de la valeur ajoutée prise en compte par la société pour le plafonnement de ces cotisations à hauteur de 11 651 932 F (1 776 325, 58 euros) pour l’année 1997 et de 3 636 694 F (554 410, 42 euros) pour l’année 1999 ;

Considérant que, dans le dernier état de ses conclusions, le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande l’annulation de l’arrêt du 9 juin 2005 de la cour administrative d’appel de Nancy rejetant son recours tendant à l’annulation de l’article 1er du jugement du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Besançon accordant à la société Euro-Sérum le dégrèvement de la cotisation de taxe professionnelle maintenue à sa charge par l’administration et à laquelle elle prétendait, compte tenu de la valeur ajoutée qu’elle avait déclarée, en tant seulement qu’il n’a pas fait droit à sa demande de rétablissement de cette cotisation compte tenu d’une majoration de la valeur ajoutée ramenée à 7 825 852 F (1 193 043 euros) pour l’année 1997 et à 3 490 108 F (532 063 euros) pour l’année 1999 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : "I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée à 3, 5 % de la valeur ajoutée produite au cours de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l’année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. (.) / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l’excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l’exercice est égale à la différence entre : / D’une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes, les produits accessoires ; les subventions d’exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l’entreprise pour elle-même ; les stocks à la fin de l’exercice ; / Et, d’autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l’exercice. / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l’exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion (.)" ;

Considérant que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d’éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l’une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l’année d’imposition concernée ; qu’aux termes de l’article 38 quater de l’annexe III au code général des impôts : "Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de l’impôt." ;

Considérant que la seule circonstance que des sommes ont été enregistrées dans les écritures d’une société au compte "transfert de charges" ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que, sans méconnaître les dispositions combinées de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, et de l’article 38 quater de l’annexe III à ce code, ces sommes soient prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée servant au plafonnement des cotisations de taxe professionnelle ; que, par suite, en se fondant seulement sur le fait que ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de la valeur ajoutée par l’article 1647 B sexies pour juger que l’administration ne pouvait légalement majorer la valeur ajoutée calculée par la société Euro-Sérum des sommes inscrites par celle-ci à un tel compte, la cour a commis une erreur de droit ; qu’il suit de là, et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen du pourvoi, que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est fondé à demander, dans la mesure de ses conclusions, l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette même mesure, l’affaire au fond ;

Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que la société Euro-Sérum a, au cours des années d’imposition en litige, inscrit au compte "transfert de charges" des sommes correspondant en particulier à des charges de personnel, à des dépenses de formation, de téléphone ou de transport, à des achats auprès de ses fournisseurs ainsi qu’à diverses fournitures ; qu’il n’est pas contesté que ces sommes ont été refacturées à des tiers ; que ces refacturations constituent, pour l’application à la société de l’article 1647 B sexies, des ventes et des prestations de services concourant à la détermination de la production des exercices en cause et auraient pu être comptabilisées comme telles ;

Considérant, d’autre part, que la société a également perçu, en 1997, une somme de 104 813, 29 F (15 978, 68 euros) correspondant au remboursement d’un sinistre ; qu’alors même qu’elle a été inscrite au compte "transfert de charges" et que ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de la valeur ajoutée par l’article 1647 B sexies, avant sa modification par l’article 85 de la loi de finances pour 2006 du 30 décembre 2005, cette somme doit, dans la mesure où il n’est pas davantage contesté qu’elle compense des charges qui ont été déduites par la société pour la détermination de sa valeur ajoutée au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers, être regardée, au sens et pour l’application de l’article 1647 B sexies, et en particulier du 1 de son II, comme une production de l’exercice au cours duquel elle a été perçue par la société ;

Considérant toutefois que la société Euro-Sérum se prévaut, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base 6 E- 4334 ;

Mais considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales : "Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration" ; que le rejet partiel par l’administration des demandes présentées par la société Euro-Sérum tendant au plafonnement de ses cotisations de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ne constitue pas un rehaussement d’impositions antérieures au sens de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; qu’il suit de là que la société ne peut se prévaloir, sur le fondement de cet article, de la documentation administrative de base ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est fondé à demander la réformation de l’article 1er du jugement du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Besançon, en tant qu’il a déchargé la société Euro-Sérum des cotisations de taxe professionnelle résultant de la prise en compte, pour le plafonnement de cette taxe, de la majoration de la valeur ajoutée excédant 7 825 852 F (1 193 043 euros) au titre de l’année 1997 et 3 490 108 F (532 063 euros) au titre de l’année 1999 et la remise à la charge de la société, dans cette mesure, des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des mêmes années ;

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par la société Euro-Sérum au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêt du 9 juin 2005 de la cour administrative d’appel de Nancy est annulé, en tant qu’il a rejeté l’appel du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE formé contre le jugement du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Besançon, en tant qu’il avait déchargé la société Euro-Sérum des cotisations de taxe professionnelle résultant de la prise en compte, pour le plafonnement de cette taxe, de majorations de la valeur ajoutée excédant 7 825 852 F (1 193 043 euros) au titre de l’année 1997 et 3 490 108 F (532 063 euros) au titre de l’année 1999.

Article 2 : Les cotisations de taxe professionnelle auxquelles la société Euro-Sérum a été assujettie, au titre de l’année 1997 dans les rôles de la commune de Port-sur-Saône (Haute-Saône), au titre de l’année 1999 dans les rôles de cette commune ainsi que dans ceux de la commune de Saint-Martin-Belle-Roche (Saône-et-Loire) sont remises à sa charge, dans la limite de la majoration de la valeur ajoutée à hauteur de 7 825 852 F (1 193 043 euros) au titre de l’année 1997 et de 3 490 108 F (532 063 euros) au titre de l’année 1999 servant de base au calcul des droits à plafonnement de cette taxe.

Article 3 : L’article 1er du jugement du 5 juillet 2001 du tribunal administratif de Besançon est réformé en ce qu’il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Les conclusions de la société Euro-Sérum tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la société Euro-Sérum.

 


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