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Conseil d’Etat, 26 mars 2008, n° 305492, EURL Les Cidres de la Ville d’Ys

S’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 632-4 du code rural qu’un accord interprofessionnel, pour être étendu, doit avoir été adopté par une décision unanime des familles professionnelles représentées dans l’interprofession, en revanche, il n’est pas nécessaire que la décision de chaque famille ait été prise à l’unanimité des membres qui la composent. Si, en l’absence de disposition en disposant autrement, la circonstance que les différentes familles professionnelles ne se prononcent pas par des votes séparés n’est pas, par elle-même, de nature à entacher la procédure d’irrégularité, c’est à la condition que la procédure de vote permette de vérifier que chaque famille a adopté l’accord conformément aux règles statutaires.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 305492

EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS

Mme Agnès Daussun
Rapporteur

M. François Séners
Commissaire du gouvernement

Séance du 21 janvier 2008
Lecture du 26 mars 2008

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 3ème et 8ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 3ème sous-section de la section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS, dont le siège est Bresignon BP 25 à Plovan (29720), agissant en exécution du jugement du tribunal d’instance de Quimper du 30 novembre 2006 ; l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS demande au Conseil d’Etat :

1°) de déclarer l’illégalité des arrêtés des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget du 23 décembre 2003 et des 16 février et 11 octobre 2004 portant respectivement extension des dispositions des accords interprofessionnels conclus au sein de l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID) les 16 septembre et 18 décembre 2003 et le 29 juin 2004 par voie de conséquence de l’irrégularité dont sont entachés ces accords interprofessionnels ;

2°) de mettre à la charge de l’UNICID le versement d’une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré présentée le 30 janvier 2008 pour l’UNICID ;

Vu la note en délibéré présentée le 8 février 2008 pour l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS ;

Vu le code rural, notamment ses articles L. 632-3, L. 632-4 et L. 632-6 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Daussun, Conseiller d’Etat,

- les observations de Me Foussard, avocat de l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS et de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID),

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement du 30 novembre 2006, le tribunal d’instance de Quimper, saisi d’un litige entre l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS et l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID) relatif au paiement par l’EURL de cotisations instituées par des accords interprofessionnels adoptés en application des articles L. 632-3 à L. 632-6 du code rural dans le cadre de l’Union interprofessionnelle les 16 septembre 2003, 18 décembre 2003 et 29 juin 2004, accords étendus par des arrêtés interministériels des 23 décembre 2003, 16 février et 11 octobre 2004, a sursis à statuer jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la légalité de ces accords et des arrêtés ministériels en portant extension ; qu’il résulte du jugement que le tribunal d’instance a renvoyé au juge administratif l’appréciation des deux moyens soulevés devant lui et relatifs à la régularité des procès-verbaux des assemblées générales d’UNICID au cours desquelles ont été adoptés lesdits accords et à la régularité de la procédure d’adoption de ces accords ;

Sur le moyen tiré de l’irrégularité des procès-verbaux :

Considérant que les éventuelles irrégularités dont seraient entachés les procès-verbaux des séances des assemblées de l’Union nationale interprofessionnelle cidricole au cours desquelles ont été adoptés les accords interprofessionnels dont le tribunal d’instance de Quimper a renvoyé l’examen de la légalité à la juridiction administrative, sont par elles-mêmes sans incidence sur la régularité des votes émis lors de ces assemblées et donc sur la légalité des accords interprofessionnels adoptés lors de ces votes ;

Sur la régularité de la procédure d’adoption des accords interprofessionnels :

Considérant qu’en vertu de l’article L. 632-3 du code rural, dans sa rédaction en vigueur à la date des arrêtés en litige, les accords conclus dans le cadre d’une organisation interprofessionnelle reconnue peuvent être étendus, pour une durée déterminée, en tout ou en partie, par l’autorité administrative compétente lorsqu’ils tendent, notamment par des actions communes conformes à l’intérêt général, à la réalisation de certains objectifs tels l’adaptation et la régularisation de l’offre ou la promotion du produit sur les marchés intérieur et extérieur ; qu’aux termes de l’article L. 632-4 du même code : "L’extension de tels accords est subordonnée à l’adoption de leurs dispositions par les professions représentées dans l’organisation interprofessionnelle, par une décision unanime. " ; que selon l’article L. 632-6 : "Les organisations interprofessionnelles reconnues (.) sont habilitées à prélever, sur tous les membres des professions les constituant, des cotisations résultant des accords étendus selon la procédure fixée aux articles L. 632-3 et L. 632-4 et qui, nonobstant leur caractère obligatoire, demeurent des créances de droit privé." ;

Considérant que s’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 632-4 du code rural qu’un accord interprofessionnel, pour être étendu, doit avoir été adopté par une décision unanime des familles professionnelles représentées dans l’interprofession, en revanche, il n’est pas nécessaire que la décision de chaque famille ait été prise à l’unanimité des membres qui la composent ; que si, en l’absence de disposition en disposant autrement, la circonstance que les différentes familles professionnelles ne se prononcent pas par des votes séparés n’est pas, par elle-même, de nature à entacher la procédure d’irrégularité, c’est à la condition que la procédure de vote permette de vérifier que chaque famille a adopté l’accord conformément aux règles statutaires ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID) est composée de deux collèges, le collège "production" comprenant douze délégués représentant la production de fruits à cidre et la transformation fermière de fruits à cidre et le collège "transformation" comprenant douze délégués représentant la transformation artisanale et industrielle de fruits à cidre ; qu’il résulte de l’article 7 des statuts de l’interprofession et de l’article 4 de son règlement intérieur que les décisions relatives aux accords soumis à l’extension sont prises à l’unanimité des collèges, le quorum de chaque collège étant égal à la moitié de ses membres présents ou représentés, et qu’au sein de chaque collège les décisions doivent être adoptées "par au moins les trois quarts des délégués présents ou représentés, et à la majorité des deux tiers" ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que lors des séances des 16 septembre 2003 et 29 juin 2004 de l’assemblée d’UNICID au cours desquelles ont été adoptés les accords interprofessionnels étendus par arrêtés des 23 décembre 2003 et 11 octobre 2004, les quorum requis étaient réunis dans chacun des collèges et que, les délégués s’étant prononcés de façon unanime, les conditions posées par l’article L. 632-4 du code rural pour permettre l’extension des accords adoptés lors de ces séances étaient réunies ; que la circonstance que les deux collèges ne se soient pas prononcés séparément n’est pas de nature, en l’absence de dispositions le prévoyant, à entacher leur vote d’irrégularité ;

Considérant, en revanche, que si le procès-verbal de l’assemblée du 18 décembre 2003 au cours de laquelle a été examiné l’accord étendu par l’arrêté du 16 février 2004 fait apparaître que l’assemblée s’est prononcée globalement sur cet accord, il n’en résulte pas que chacun des collèges ait adopté cet accord conformément aux dispositions précitées du code rural ; que par suite l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS est fondée à soutenir que cet accord a été adopté à l’issue d’une procédure irrégulière et à demander au Conseil d’Etat de le déclarer illégal ainsi que, par voie de conséquence, l’arrêté interministériel du 16 février 2004 en portant extension ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l’Union nationale interprofessionnelle cidricole la somme de trois mille euros que demande l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’ EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l’Union nationale interprofessionnelle cidricole demande à ce même titre ;

D E C I D E :

Article 1er : L’accord interprofessionnel adopté le 18 décembre 2003 par l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID) et l’arrêté des ministres chargés de l’agriculture, de l’économie et du budget du 16 février 2004 portant extension de cet accord sont déclarés illégaux.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : L’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID) versera la somme de trois mille euros à l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS par application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l’EURL LES CIDRES DE LA VILLE D’YS, à l’Union nationale interprofessionnelle cidricole (UNICID), au ministre de l’agriculture et de la pêche et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

 


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