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Cour administrative d’appel de Paris, 18 décembre 2003, n° 02PA02477, Arame M.

Dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, l’autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

N° 02PA02477

Mme M.

M. JANNIN
Président

M. LENOIR
Rapporteur

M. HEU
Commissaire du Gouvernement

Séance du 4 décembre 2003
Lecture du 18 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

(1ère Chambre A)

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2002 au greffe de la cour, présentée pour Mme Arame M. ; Mme M. demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement N°0105844/4 du 7 mai 2002 par lequel le tribunal administratif de PARIS a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 4 janvier 2001 par laquelle le préfet de police a refusé d’autoriser le regroupement familial sollicité en faveur de ses deux filles Oumy et Fatou D. ;

2°) d’annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d’enjoindre au préfet de police de délivrer un titre de séjour à ses deux filles dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt de la cour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 1500 euros en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

VU la convention relative aux droits de l’enfant ;

VU l’ordonnance N°45-2658 du 2 novembre 1945 ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 4 décembre 2003 :
- le rapport de M. LENOIR, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HEU, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

Considérant qu’aux termes de l’article l’article 29 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction résultant de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 : " I. - Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins un an, sous couvert d’un des titres d’une durée de validité d’au moins un an prévus par la présente ordonnance ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. Le regroupement familial peut également être sollicité pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint dont, au jour de la demande, la filiation n’est établie qu’à l’égard du demandeur ou de son conjoint ou dont l’autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux.... " ; qu’aux termes de l’article 3-1 de la convention relative aux droits de l’enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait d’institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale " ; qu’il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir, que, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, l’autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que, par une demande enregistrée le 26 janvier 2000, Mme M., de nationalité sénégalaise, a sollicité, sur le fondement des dispositions précitées de l’article 29 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, la délivrance d’un titre de séjour en faveur de ses deux filles mineures, Oumy et Fatou DIOP ; que, par une décision en date du 4 janvier 2001, le préfet de police a opposé un refus à la demande de l’intéressée aux motifs que ses enfants résidaient déjà sur le sol français, qu’elle ne disposait pas de ressources suffisantes et qu’elle ne justifiait pas d’une décision judiciaire lui confiant la garde des ses enfants ;

Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que les jeunes Oumy et Fatou D., âgées respectivement de seize et de treize ans à la date de la décision attaquée, vivaient en France depuis 1995 avec leur mère, laquelle était en situation régulière sur le territoire français ; que, par un jugement du 2 janvier 2000, le tribunal départemental de Dakar a attribué à Mme M. l’exercice de la puissance paternelle compte tenu de l’impossibilité absolue du père d’Oumy et Fatou DIOP, qui habitait le Sénégal, de s’acquitter de l’ensemble de ses devoirs ; que, par suite, et dès lors qu’il n’est pas établi que d’autres membres de leur famille demeurés au Sénégal auraient pu prendre à leur charge ces deux mineures, la décision attaquée, prise alors qu’aucune modification de leur situation familiale n’était intervenue depuis le dépôt de la demande, a eu pour effet de porter atteinte à l’intérêt supérieur des enfants de Mme M. et doit donc être regardée comme contraire aux stipulations précitées de l’article 3-1 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant ;

Considérant, par suite, que Mme M. est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

Considérant qu’aux termes de l’article L.911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution" ;

Considérant que si le présent arrêt implique que le préfet de police procède à un réexamen de la situation de Mlles Oumy et Fatou DIOP, il n’implique pas nécessairement que leur soit délivré un titre de séjour ; que, par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme M. tendant à ce qu’il soit fait injonction au préfet de police de procéder à cette délivrance ;

Sur les conclusions de Mme M. tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte tenu de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant que Mme M. n’allègue pas avoir exposé dans la présente instance des frais autres que ceux pris en charge par l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce que l’Etat soit condamné à l’indemniser sur le fondement des dispositions précitées de l’article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 7 mai 2002 du tribunal administratif de Paris et la décision en date du 4 janvier 2001 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme M. est rejeté

 


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