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Conseil d’Etat, 3 décembre 2003, n° 223569, M. Daniel G.

Si l’autorité de nomination est liée quant au principe même de la nomination, à l’issue de leur scolarité à l’Ecole nationale de la magistrature, des candidats reçus au concours organisé en application des dispositions précédemment mentionnées de la loi organique du 24 février 1998, il appartient toutefois au Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux, ministre de la justice de s’opposer à une telle nomination lorsque leur sont révélés des faits jusqu’alors ignorés de l’administration et qui sont de nature à établir que l’intéressé ne satisfait pas à l’exigence de "bonne moralité" à laquelle doivent répondre les candidats à la magistrature en vertu de l’article 16 de l’ordonnance organique du 22 décembre 1958, auquel se réfère l’article 1er de la loi organique du 24 février 1998.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 223569,228818

M. G.

Mme Ducarouge
Rapporteur

M. Lamy
Commissaire du gouvernement

Séance du 5 novembre 2003
Lecture du 3 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 6ème et 4ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 6ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°), sous le n° 223569, la requête, enregistrée le 26 juillet 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Daniel G. ; M. G. demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir l’avis défavorable en date du 10 mai 2000 émis par le Conseil supérieur de la magistrature sur sa proposition de nomination en qualité de conseiller du second grade à la cour d’appel de Pau, à l’issue de son stage à l’Ecole nationale de magistrature à laquelle il avait été reçu par la voie d’un concours exceptionnel de recrutement de magistrats de l’ordre judiciaire prévu par la loi organique n° 98-105 du 24 février 1998 ;

Vu 2°), sous le n° 228818, la requête, enregistrée le 3 janvier 2001, présentée par Daniel G. ; M. G. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté son recours gracieux contre la décision notifiée le 29 mai 2000 à la demande du directeur des services judiciaires, et refusé, d’une part, de prononcer sa nomination en qualité de conseiller du second grade à la cour d’appel de Pau, d’autre part, de procéder à une nouvelle proposition de nomination ;

2°) d’ordonner au ministre de la justice de lui faire une nouvelle proposition de nomination dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 1 000 F par jour de retard ;

3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 10 000 F en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée ;

Vu la loi organique n° 98-105 du 24 février 1998 ;

Vu le décret n° 98-243 du 2 avril 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ducarouge, Conseiller d’Etat,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. G.,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de M. G. présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;

Considérant que la loi organique du 24 février 1998 a autorisé un recrutement exceptionnel par concours de magistrats de l’ordre judiciaire ; que l’article 2 de cette loi est relatif au recrutement de magistrats du second grade de la hiérarchie judiciaire appelés à exercer directement les fonctions de conseiller de cour d’appel ; que l’article 4 de la loi précise que les candidats admis reçoivent une formation à l’Ecole nationale de la magistrature, à l’issue de laquelle ils sont nommés, s’agissant des candidats reçus au concours prévu par l’article 2, dans les fonctions pour lesquelles ils ont été recrutés par décret du Président de la République pris sur proposition du Garde des sceaux, ministre de la justice et sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature ;

Considérant que M. G., admis au concours prévu par l’article 2 de la loi du 24 février 1998, a fait l’objet, à l’issue de sa scolarité à l’Ecole nationale de la magistrature, d’un avis du Conseil supérieur de la magistrature défavorable à sa nomination ; qu’à la suite de cet avis défavorable à sa nomination, le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de proposer au Président de la République sa nomination comme conseiller de cour d’appel ; que M. G. demande l’annulation de l’avis du Conseil supérieur de la magistrature et de la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté implicitement le recours gracieux qu’il a formé contre le refus de proposer sa nomination ;

Sur les conclusions relatives à l’avis du Conseil supérieur de la magistrature :

Considérant que cet avis n’est pas détachable de la décision prononcée à sa suite ; que, s’il peut contester le bien-fondé de l’avis du Conseil supérieur de la magistrature à l’appui de conclusions dirigées contre le refus de proposer sa nomination, M. G. n’est, par suite, pas recevable à en demander l’annulation ;

Sur les conclusions relatives à la décision du garde des sceaux, ministre de la justice :

Considérant que si l’autorité de nomination est liée quant au principe même de la nomination, à l’issue de leur scolarité à l’Ecole nationale de la magistrature, des candidats reçus au concours organisé en application des dispositions précédemment mentionnées de la loi organique du 24 février 1998, il appartient toutefois au Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux, ministre de la justice de s’opposer à une telle nomination lorsque leur sont révélés des faits jusqu’alors ignorés de l’administration et qui sont de nature à établir que l’intéressé ne satisfait pas à l’exigence de "bonne moralité" à laquelle doivent répondre les candidats à la magistrature en vertu de l’article 16 de l’ordonnance organique du 22 décembre 1958, auquel se réfère l’article 1er de la loi organique du 24 février 1998 ;

Considérant, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que si M. G. a produit dans son dossier de candidature une attestation du directeur de l’exercice professionnel de l’ordre des avocats à la cour de Paris, selon laquelle " ... M. G. a été inscrit au tableau du barreau de Paris du 11 décembre 1974 au 30 mai 1995, date à laquelle le conseil de l’ordre a pris acte de sa démission, M. G. a été radié par arrêté du conseil de l’ordre en date du 17 juillet 1996 ", cette attestation n’indique pas les circonstances de fait ayant conduit le requérant à démissionner et le conseil de l’ordre à le radier du tableau de l’ordre ; qu’il en résulte que le moyen tiré de ce que l’administration aurait été informée avant le déroulement du concours des faits à raison desquels la nomination de l’intéressé a été refusée doit être écarté ;

Considérant, d’autre part, qu’il ressort des pièces du dossier que l’administration n’a eu connaissance des graves manquements à l’honnêteté commis en 1993 par M. G., alors qu’il était avocat, au préjudice de ses clients qu’au cours du stage suivi par l’intéressé à l’Ecole nationale de la magistrature ; que ces faits, dont le requérant ne conteste pas la matérialité, sont de nature à établir que M. G. ne satisfait pas à l’exigence de "bonne moralité" et qu’en conséquence sa nomination comme magistrat devait être refusée ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. G. n’est pas fondé à demander l’annulation de la décision implicite, qui n’est pas illégale faute de motivation et qui n’avait pas à être précédée d’une nouvelle délibération du Conseil supérieur de la magistrature, par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a rejeté le recours gracieux qu’il avait formé contre le refus de le nommer comme conseiller de cour d’appel ;

Considérant que les conclusions à fin d’injonction présentées par M. G. ne peuvent qu’être rejetées par voie de conséquence ; qu’il en va de même de ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. G. sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Daniel G. et au garde des sceaux, ministre de la justice.

 


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