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Conseil d’Etat, 29 septembre 2003, n° 243654, Société Télévision Française 1 (TF1)

Les dispositions attaquées sont fondées sur les dispositions de l’article 71 de la loi du 30 septembre 1986 qui confient au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions dans lesquelles une oeuvre cinématographique sera prise en compte au titre de la contribution d’un éditeur de service à la production indépendante notamment selon la nature et l’étendue de la responsabilité du service dans la production de l’œuvre. En application de ces dispositions, le gouvernement a légalement pu décider qu’une entreprise qui ne prend pas elle-même ou ne partage pas solidairement l’initiative et la responsabilité financière, technique et artistique d’une oeuvre ou n’en garantit pas la bonne fin était assimilée à une entreprise indépendante pour l’application de l’article 6 du décret du 28 décembre 2001, sans imposer d’autres conditions relatives à la part détenue par l’éditeur de service en cause dans le capital de l’entreprise, à la part que l’entreprise détient au capital de l’éditeur de service ou au contrôle exercé par un actionnaire ou un groupe d’actionnaire à la fois sur l’éditeur de service et sur l’entreprise.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 243654

SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1)

M. Aladjidi
Rapporteur

M. Olson
Commissaire du gouvernement

Séance du 8 septembre 2003
Lecture du 29 septembre 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 28 février et le 28 juin 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1), dont le siège est 1, quai du Point du Jour à Boulogne Cedex (92656), la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1) demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler le dernier paragraphe de l’article 6 du décret n° 2001-1332 du 28 décembre 2001 pris pour l’application des articles 27, 28 et 71 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et relatif à la contribution des éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique dont le financement fait appel à une rémunération de la part des usagers au développement de la production d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 septembre 2003 présentée pour la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1) ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu le décret n° 99-130 du 24 février 1999 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1) et de la SCP Boutet, avocat de la société Canal +,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Canal + :

Considérant qu’aux termes de l’article 27 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : " Compte tenu des missions d’intérêt général des organismes du secteur public et des différentes catégories de services de communication audiovisuelle diffusés par voie hertzienne terrestre, des décrets en Conseil d’Etat fixent les principes généraux définissant les obligations concernant : (...) 3° La contribution des éditeurs de services au développement de la production, notamment de la production indépendante à leur égard, d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, ainsi que la part de cette contribution ou le montant affectés à l’acquisition des droits de diffusion de ces oeuvres sur les services qu’ils éditent, en fixant, le cas échéant, des règles différentes pour les oeuvres cinématographiques et pour les oeuvres audiovisuelles et en fonction de la nature des oeuvres diffusées et des conditions d’exclusivité de leur diffusion. (...)" ; qu’aux termes de l’article 71 de la même loi : " Les décrets prévus aux articles 27 et 33 précisent les conditions dans lesquelles une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle peut être prise en compte au titre de la contribution d’un éditeur de service à la production indépendante, selon les critères suivants : 1° La durée de détention des droits de diffusion par l’éditeur de service ; / 2° L’étendue des droits secondaires et des mandats de commercialisation, détenus directement ou indirectement par l’éditeur de service ; / 3° La nature et l’étendue de la responsabilité du service dans la production de l’oeuvre. (...)/ Ces décrets prennent également en compte les critères suivants, tenant à l’entreprise qui produit l’oeuvre : / 1° La part, directe ou indirecte, détenue par l’éditeur de service au capital de l’entreprise ; / 2° La part, directe ou indirecte, détenue par l’entreprise au capital de l’éditeur de service ; / 3° La part, directe ou indirecte, détenue par un actionnaire ou un groupe d’actionnaires à la fois au capital de l’éditeur de service et au capital de l’entreprise ; / 4° Le contrôle exercé par un actionnaire ou un groupe d’actionnaires à la fois sur l’éditeur de service et sur l’entreprise ; / 5° La part du chiffre d’affaires ou le volume d’oeuvres réalisé par l’entreprise avec l’éditeur de service. / Ces décrets fixent les critères mentionnés au présent article retenus pour les oeuvres cinématographiques et ceux retenus pour les oeuvres audiovisuelles et déterminent leurs modalités d’application" ;

Considérant qu’aux termes de l’article 5 du décret du 28 décembre 2001 pris pour l’application des articles 27, 28 et 71 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et relatif à la contribution des éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique dont le financement fait appel à une rémunération de la part des usagers au développement de la production d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles : "Les éditeurs de services consacrent chaque année au moins 20 % de leurs ressources totales de l’exercice à l’acquisition de droits de diffusion d’oeuvres cinématographiques. / Les acquisitions de droits de diffusion d’oeuvres cinématographiques européennes et d’expression originale française représentent, respectivement, au moins 12 % et 9 % des ressources totales de l’exercice. En outre, ces acquisitions ne peuvent être inférieures à des montants par abonné en France déterminés par la convention" ; qu’aux termes de l’article 6 du même décret : " Au moins trois quarts des dépenses d’acquisition de droits de diffusion d’oeuvres cinématographiques d’expression originale française et d’oeuvres répondant aux conditions prévues à l’article 10 du décret du 24 février 1999 susvisé, qui n’ont pas été diffusées en France par un service de télévision hors paiement à la séance, sont consacrées par les éditeurs de services à la production indépendante, selon des critères liés à l’oeuvre et à l’entreprise qui la produit (...) II - Est réputée indépendante d’un éditeur de services l’entreprise de production qui répond aux conditions suivantes : 1° L’éditeur de services ne détient pas, directement ou indirectement, plus de 15 % de son capital social ou de ses droits de vote ; / 2° Elle ne détient pas, directement ou indirectement, plus de 15 % du capital social ou des droits de vote de l’éditeur de services ; / 3° Aucun actionnaire ou groupe d’actionnaires la contrôlant au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce ne contrôle, au sens du même article, l’éditeur de services. / Toutefois, est assimilée à une entreprise indépendante d’un éditeur de services l’entreprise qui ne prend pas personnellement ou ne partage pas solidairement l’initiative et la responsabilité financière, technique et artistique de l’oeuvre considérée et n’en garantit pas la bonne fin" ;

Considérant que la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1) demande l’annulation des dispositions précitées du dernier alinéa du II de l’article 6 du décret du 28 décembre 2001 qui ont pour effet de permettre à la société Canal + de prendre en compte au titre de sa contribution au développement de la production indépendante d’oeuvres cinématographiques les dépenses d’acquisition des droits de diffusion de certaines des oeuvres qui ont été produites par les filiales dont elle détient plus de quinze pour cent du capital social ou des droits de vote, dès lors que, pour les oeuvres en question, ces filiales n’ont pas assumé elles-mêmes ou partagé solidairement de responsabilités de production déléguée, au sens de l’article 6 du décret du 24 février 1999 relatif au soutien financier de l’industrie cinématographique ;

Considérant, en premier lieu, qu’en prenant les dispositions attaquées, les auteurs du décret n’ont pas excédé la compétence qui leur a été donnée par les articles 27 et 71 précités de la loi du 30 septembre 1986 qui prévoient que seront fixés, par décret en Conseil d’Etat, les principes généraux relatifs à la contribution des éditeurs de services au développement de la production indépendante d’oeuvres cinématographiques et les conditions dans lesquelles une oeuvre peut être prise en compte au titre de cette contribution ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions attaquées sont fondées sur les dispositions de l’article 71 de la loi du 30 septembre 1986 précité qui confient au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions dans lesquelles une oeuvre cinématographique sera prise en compte au titre de la contribution d’un éditeur de service à la production indépendante notamment selon la nature et l’étendue de la responsabilité du service dans la production de l’œuvre ; qu’en application de ces dispositions, le gouvernement a légalement pu décider qu’une entreprise qui ne prend pas elle-même ou ne partage pas solidairement l’initiative et la responsabilité financière, technique et artistique d’une oeuvre ou n’en garantit pas la bonne fin était assimilée à une entreprise indépendante pour l’application de l’article 6 du décret du 28 décembre 2001, sans imposer d’autres conditions relatives à la part détenue par l’éditeur de service en cause dans le capital de l’entreprise, à la part que l’entreprise détient au capital de l’éditeur de service ou au contrôle exercé par un actionnaire ou un groupe d’actionnaire à la fois sur l’éditeur de service et sur l’entreprise ;

Considérant, en troisième lieu, que le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un comme dans l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la norme qui l’établit ; qu’en l’espèce, la différence de traitement dont les dispositions attaquées font bénéficier ceux des éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique, dont le financement fait appel à une rémunération de la part des usagers, n’est pas manifestement disproportionnée par rapport à la situation des autres éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique, compte tenu de la part de leurs recettes qu’ils doivent consacrer chaque année, en application des dispositions précitées de l’article 5 du décret attaqué, à l’acquisition de droits de diffusion d’oeuvres cinématographiques, notamment d’expression originale française ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société requérante n’est pas fondée à demander l’annulation des dispositions attaquées ;

Sur les conclusions présentées par la société requérante en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la société requérante la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1) est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE TELEVISION FRANÇAISE 1 (TF1), à la société Canal +, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.

 


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