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Conseil d’Etat, 19 février 2003, n° 235697, Société Auberge ferme des Genets

L’interprétation que, par voie, notamment, de circulaires ou d’instructions, l’autorité administrative donne des lois et règlements qu’elle a pour mission de mettre en oeuvre n’est pas susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir lorsque, étant dénuée de caractère impératif, elle ne saurait, quel qu’en soit le bien-fondé, faire grief. En revanche, les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction doivent être regardées comme faisant grief, tout comme le refus de les abroger. Le recours formé à leur encontre doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, un règle nouvelle entachée d’incompétence ou si, alors même qu’elles ont été compétemment prises, il est soutenu à bon droit qu’elles sont illégales pour d’autres motifs. Il en va de même s’il est soutenu à bon droit que l’interprétation qu’elles prescrivent d’adopter, soit méconnaît le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elle entendait expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 235697

SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS

M. Bereyziat
Rapporteur

M. Collin
Commissaire du gouvernement

Séance du 27 janvier 2003
Lecture du 19 février 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunie)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS, dont le siège est RN 112, route de Sète à Villeneuve-les-Maguelone (34750), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS demande au Conseil d’Etat

1°) d’annuler la décision du 15 mai 2001 par laquelle le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a refusé de faire droit à la demande contenue dans sa lettre du 27 mars 2001 et tendant à l’abrogation, en premier lieu, de la note de la direction générale des impôts datée du 29 octobre 1987 et relative à la situation des établissements de restauration rapide au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, en deuxième lieu, de l’instruction 3 C-1-94 du 22 décembre 1993, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts du 4 janvier 1994 et relative aux taux de taxe sur la valeur ajoutée applicables à certains établissements de restauration rapide, en troisième et dernier lieu, de l’instruction 3 C-8-00 du 19 septembre 2000, publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts du 27 septembre 2000 ;

2°) d’enjoindre au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie d’abroger ces instructions ;

3°) de condamner l’Etat à payer à la société la somme de 20 000 F sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 modifiée, relative à l’harmonisation des législations des Etats membres en matière de taxes sur le chiffre d’affaires ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978 portant loi de finances pour 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bereyziat, Auditeur,
- les conclusions de M. Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l’interprétation que, par voie, notamment, de circulaires ou d’instructions, l’autorité administrative donne des lois et règlements qu’elle a pour mission de mettre en oeuvre n’est pas susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir lorsque, étant dénuée de caractère impératif, elle ne saurait, quel qu’en soit le bien-fondé, faire grief ; qu’en revanche, les dispositions impératives à caractère général d’une circulaire ou d’une instruction doivent être regardées comme faisant grief, tout comme le refus de les abroger ; que le recours formé à leur encontre doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, un règle nouvelle entachée d’incompétence ou si, alors même qu’elles ont été compétemment prises, il est soutenu à bon droit qu’elles sont illégales pour d’autres motifs ; qu’il en va de même s’il est soutenu à bon droit que l’interprétation qu’elles prescrivent d’adopter, soit méconnaît le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu’elle entendait expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS, entreprise de restauration sise à Villeneuve-les-Maguelone (Hérault), a demandé le 27 mars 2001 au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie d’abroger les dispositions relatives à l’application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée aux ventes réalisées par les établissements de "restauration rapide" et contenues, en premier lieu, dans une note de la direction générale des impôts datée du 29 octobre 1987, en deuxième lieu, dans l’instruction ministérielle 3 C-1-94 du 22 décembre 1993, publiée le 4 janvier 1994 au Bulletin officiel . de cette direction, en troisième et dernier lieu, dans l’instruction 3 C-8-00 du 19 septembre 2000. publiée au même bulletin le 27 septembre 2000, qu’elle estime illégales ; que la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS a demandé l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 15 mai 2001 par laquelle le ministre a refusé de faire droit à cette demande ;

Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne le refus d’abrogation de la note du 29 octobre 1987 :

Considérant que le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie soutient, sans être contredit, que cette note se borne à donner aux agents en charge du contrôle fiscal des entreprises de restauration certaines indications relatives à l’exercice de ce contrôle ; que, dès lors, les dispositions de cette note ne peuvent être regardées que comme dépourvues de caractère impératif ; que, par suite, la décision du 15 mai 2001 par laquelle le ministre a refusé de les rapporter ne saurait faire grief à la société requérante ;

En ce fui concerne le refus d’abrogation des instructions des 22 décembre 1993 et 19 septembre 2000 :

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date à laquelle le ministre s’est prononcé sur la demande d’abrogation dont il était saisi, les dispositions encore en vigueur de l’instruction du 22 décembre 1993 relatives aux taux de taxe sur la valeur ajoutée applicables aux établissements de restauration rapide, comme celles de l’instruction susmentionnée du 19 septembre 2000, avaient pour seul objet, en premier lieu, de préciser qu’une distinction devait être opérée entre, d’une part, les ventes à emporter de produits alimentaires, qui constituent une livraison de biens visés au 2° de l’article 278 bis du code général des impôts et peuvent, à ce titre, bénéficier du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée et, d’autre part, les ventes de produits alimentaires destinés à être consommés sur place, qui présentent le caractère d’une prestation de services passible du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu’il y ait lieu de distinguer, en aucune hypothèse, si l’établissement assujetti à la taxe à raison de ces ventes relève ou non des établissements dits de restauration rapide, en second lieu, d’indiquer qu’il appartenait aux établissements de restauration vendant concurremment des produits alimentaires à consommer sur place ou à emporter d’établir par tout moyen la répartition de leur ventes entre chacune de ces catégories ;

Considérant qu’il suit de là que le moyen tiré de ce que ces dispositions, dans leur rédaction applicable aux faits de la cause, auraient eu pour objet ou pour effet d’organiser une discrimination contraire au principe d’égalité ainsi qu’au droit communautaire au profit des entreprises dites de restauration rapide, dans la mesure où ces dernières auraient été présumées exercer une activité unique de vente à emporter, manque en fait ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les conclusions de la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS tendant à l’annulation de la décision du 15 mai 2001 par laquelle le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a refusé de faire droit à la demande d’abrogation de la note du 29 octobre 1987 et des instructions des 22 décembre 1993 et 19 septembre 2000 susmentionnées, ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS tendant à l’annulation de la décision du 15 mai 2001 par laquelle le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a refusé de faire droit à la demande d’abrogation du 27 mars 2001 susmentionnée, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, dès lors, les conclusions de cette société tendant à ce que le Conseil d’Etat enjoigne au ministre de procéder à l’abrogation dont s’agit ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AUBERGE FERME DES GENETS et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

 


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