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Vade-Mecum pour tenter de comprendre la mécanique complexe des 35 heures (à la suite de la Loi dite AUBRY II)

Par Patrick LINGIBÉ
Avocat au Barreau de la Guyane, Chargé de Cours à l’Institut d’Études Supérieures de la Guyane

La loi du 13 Juin 1998, dite Loi AUBRY I, a posé le principe de la réduction de la durée hebdomadaire du travail à 35 heures par la voie de la négociation. La loi du 19 Janvier 2000, dite Loi AUBRY II, est intervenue pour fixer le cadre légal de cette réduction.

Cette seconde loi d’importance est l’occasion de faire le point sur le dispositif organisant le passage aux 35 heures, dispositif à connaître impérativement car il s’imposera, bon gré malgré, à l’ensemble des entreprises à compter du 1er Janvier 2002.

Les lois AUBRY ont posé une règle de jeu simple : plus une entreprise (aujourd’hui de 20 salariés et moins) adopte de manière anticipée le régime des 35 heures, plus les avantages et aides afférents à ce passage seront conséquents pour elle.

Toutefois, adopter le régime des 35 heures suppose de comprendre d’une part le principe de ce régime ainsi que ses modalités d’application.

Malheureusement, le dispositif de réduction du temps de travail est d’une complexité certaine et la mécanique instituée est loin d’être compréhensible pour l’ensemble des chefs d’entreprise et des salariés.

Le présent article a donc pour objet d’exposer, de façon synthétique (un certain nombre d’informations n’étant pas abordées), l’essentiel de la mécanique juridique complexe mise en place notamment par la seconde loi AUBRY du 19 Janvier 2000 sur la réduction du temps de travail.

LES CINQ AXES PRINCIPAUX DE LA LOI DU 19 JANVIER 2000.

La loi dite AUBRY II repose sur CINQ axes majeurs qu’il faut connaître pour comprendre l’esprit du dispositif de réduction du temps de travail.

Ces cinq axes peuvent se résumer de la manière suivante :

- La standardisation de la durée légale du travail à 35 heures : la loi confirme le principe des 35 heures posé un an et demi plutôt par la loi du 13 Juin 1998.

- Une nouvelle définition du régime des heures supplémentaires : c’est une conséquence obligée de l’application légale des 35 heures.

- Une nouvelle définition des modalités dans l’organisation du travail en recourant à la négociation : cet axe traduit la volonté affichée déjà dans la loi dite AUBRY I du 13 Juin 1998 d’instaurer de façon négociée l’organisation du travail.

- Une simplification des formalités d’accès aux aides incitatives pour les petites entreprises : cette simplification a pour corollaire un dispositif d’allègement des cotisations patronales sur les bas et moyens salaires.

- L’institution d’une garantie de rémunération pour les salariés rémunérés sur la base du SMIC : aucune baisse salariale ne peut être envisagée pour ces salariés.

LE CHAMP D’APPLICATION DES LOIS AUBRY : une standardisation en 2002.

Toutes les entreprises et les unités économiques sociales (regroupement de plusieurs sociétés différentes pilotées par une même direction) sont concernées. 

Le principe est que la durée légale hebdomadaire du travail est fixée à 35 heures au lieu de 39 heures.

Cet abaissement se fera en deux étapes suivant l’effectif de l’entreprise :

- pour les entreprises de plus de 20 salariés, les 35 heures sont obligatoires depuis le 1er Janvier 2000 ;

- pour les entreprises de 20 salariés et moins, les 35 heures ne seront obligatoires qu’à partir du 1er Janvier 2002.

Cependant, il convient de préciser que les deux lois AUBRY ne sont pas applicables aux salariés de la Fonction Publique (état, Territoriale et Hospitalière), ceux-ci feront l’objet de dispositions spécifiques.

LE CALCUL DE L’EFFECTIF APPLICABLE POUR LES 35 HEURES.

Pour savoir si le dispositif des 35 heures est applicable dès le 1er Janvier 2000, on doit tenir compte de l’effectif de l’entreprise.

L’effectif légal de 20 salariés se calcule sur une période de 12 mois consécutifs ou non au cours des trois dernières années.

La seconde loi AUBRY du 19 Janvier 2000 étant entrée en vigueur le 1er Février 2000, c’est donc à la date du 1er Janvier 2000 qu’il convient de se placer pour calculer si l’effectif de l’entreprise concernée est de 20 salariés (années 1997, 1998 et 1999).

Cela veut dire en clair qu’une entreprise peut se trouver concernée par le dispositif AUBRY au 1er Janvier 2000 si le seuil de 20 salariés a été dépassé pendant 12 mois au cours des années 1997, 1998 et 1999, cela alors même que son effectif serait inférieur à ce chiffre en 2000.

VERS UNE NOUVELLE DéFINITION DU TEMPS EFFECTIF DE TRAVAIL.

A défaut d’accord de réduction sur le temps de travail au sein de l’entreprise, les heures supplémentaires sont calculées à compter de la 36ème heure.

Définir le seuil des 35 heures et donc au-delà le calcul des heures supplémentaires revient à définir au préalable le temps effectif de travail.

En effet, toute période de travail effectuée au sein de l’entreprise n’est pas ipso facto considérée comme temps de travail effectif et donc imputable sur le contingent de 35 heures hebdomadaires.

L’alinéa 1er de l’article L. 212-4 du Code du travail, tel que modifié par la première loi AUBRY, définit le temps de travail effectif comme étant « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ».

Ainsi, à titre d’exemple, on peut citer les pauses déjeuner, lesquelles ne font en principe pas partie du temps de travail effectif (dans la mesure où l’employeur n’intervient pas durant cette pause et n’exerce donc aucun contrôle).

Attention toutefois, ces périodes peuvent être considérées comme temps de travail effectif à partir du moment où il peut être démontré que, dans les faits, l’employeur continue à exercer un contrôle sur les salariés en repos.


C’est ainsi, que la Cour de Cassation, dans une décision du 10 Mars 1998, affaire EPA des aéroports de Paris c./. Pelligrini, a considéré que des salariés travaillant en cycle continu sans pouvoir s’éloigner de leur poste de travail, même pendant le temps des repas, restaient dans les faits à la disposition de leur employeur ; en conséquence ces temps de repas doivent être compris dans la durée du temps de travail effectif.(1

VERS UNE NOUVELLE DéFINITION DE LA DURéE MAXIMALE MOYENNE DE TRAVAIL.

Une définition des termes s’impose au préalable ici car on confond trop souvent deux notions, à savoir celle de durée obligatoire du temps de travail et celle de durée légale du travail.

En effet, contrairement à une idée reçue, il n’est en aucun cas obligatoire d’adopter l’horaire hebdomadaire de 35 heures.

En fait, contrairement à ce que beaucoup de personnes croient à tort, ce n’est en aucun cas la durée obligatoire du temps de travail qui a été abaissée par le législateur à 35 heures, mais seulement la durée légale du travail.

Cette distinction est importante, car concrètement, une entreprise peut très bien faire travailler son personnel plus de 35 heures par semaine sans violer la durée obligatoire du temps de travail.

La différence résidera dans le fait que toutes les heures effectuées au-delà de 35 heures constitueront des heures supplémentaires. 

Comme on peut le constater donc la notion de durée légale du travail que le dispositif AUBRY I et II fait passer de 39 heures à 35 heures hebdomadaires sert à fixer le seuil des heures supplémentaires.

Par ailleurs, le législateur a posé le principe qui veut que sur une période de calcul basée sur douze semaines consécutives, la durée maximale moyenne de travail hebdomadaire soit limitée à 44 heures au lieu de 46 heures auparavant.

Attention, la durée maximale de travail ne peut en aucun cas dépasser 48 heures au cours d’une même semaine et à 10 heures par jour.

Les durées maximales précitées concernent même les entreprises de moins de 20 salariés qui restent soumises à la durée légale de 39 heures jusqu’au 1er Janvier 2002.

UNE GARANTIE DE RéMUNéRATION DES SALARIéS PERCEVANT LE SMIC NUANCéE.
 
Le législateur a posé le principe suivant lequel les salariés rémunérés sur la base du SMIC bénéficient d’une garantie de rémunération.

Toutefois, cette garantie de rémunération ne joue pas dans tous les cas : ce qui conduit donc à envisager deux catégories de salariés : d’une part, ceux qui percevront un SMIC normal (35 heures payées 39 heures) et d’autre part, ceux qui seront rémunérés sur la base d’un SMIC minoré (35 heures payées 35 heures).

A)- Les salariés bénéficiant d’un SMIC normal.

En premier lieu, il s’agit de tous les salariés présents au sein de l’entreprise au moment de la mise en œuvre des 35 heures à partir du 1er Janvier 2000.

En deuxième lieu, la loi a prévu que les salariés qui sont recrutés après la mise en place des 35 heures peuvent bénéficier de cette garantie de rémunération sous la réserve expresse qu’ils occupent un emploi dit équivalent (2).

En clair, la rémunération de ces salariés ne peut donc en aucun cas être affectée par la réduction du temps de travail mise en place au sein de l’entreprise.

Afin de garantir cette rémunération, la loi AUBRY II a ainsi institué le versement d’un complément différentiel à compter du 1er Janvier 2000.

Concrètement, le SMIC garanti résultera donc d’une part, du salaire de base et d’autre part, du complément différentiel.

Le complément différentiel de salaire a été affecté du coefficient multiplicateur 151,67 heures par mois représentant la nouvelle durée mensuelle du travail à temps complet.

Nous prendrons comme exemple le cas d’une entreprise qui passe de 39 heures à 35 heures en l’an 2000 avec un salarié rémunéré au SMIC.

Sur la base de 39 heures hebdomadaires, le salaire brut mensuel s’élève à 7.101,38 Francs, soit 169 X 42,02 Francs.

Après le passage aux 35 heures hebdomadaires, le salaire brut mensuel s’élève mathématiquement (calculé sur la base de 35 heures) à 6.373,17 Francs, soit 151,67 X 42,02 Francs.

Compte tenu de la garantie de maintien de salaire dont bénéficie le salarié rémunéré sur la base du SMIC, ledit salarié percevra de jure un complément différentiel de salaire s’élevant dans notre cas à 728,21 Francs, somme représentant la différence entre le salaire antérieur calculé sur la base des 39 heures (7.101,38 Francs) et le nouveau salaire calculé sur la base des 35 heures (6.373,17 Francs).

Au final donc le salaire ne sera pas affecté par le passage aux 35 heures et sera maintenu sur la base des 169 heures mensuelles antérieures du fait du versement du complément différentiel de salaire.

Le salaire se décomposera donc de la manière suivante après le passage aux 35 heures  :

- d’une part, le salaire de base antérieur plafonné à 169 heures :  6.373,17 Francs

- d’autre part, le complément différentiel de salaire : 728,21 Francs

A noter que ce complément différentiel de salaire doit figurer impérativement sur le bulletin de paie.

Le législateur a prévu la suppression de ce complément différentiel au plus tard le 1er Juillet 2005.
 

B)- Les salariés rémunérés sur la base d’un SMIC minoré.

Il s’agit en l’occurrence des salariés embauchés par l’entreprise après l’application des 35 heures et qui n’occupent pas d’emplois entrant dans la notion légale non définie dite d’emplois équivalents (3).

En l’espèce, ces nouveaux salariés atypiques ne bénéficieront pas du complément différentiel alloué aux salariés mentionnés plus haut et seront donc rémunérés sur la base uniquement d’une durée de travail de 35 heures hebdomadaires.

Ainsi, un salarié recruté par une entreprise, après la mise en place des 35 heures, et rémunéré sur la base du SMIC dans un emploi non équivalent à temps complet percevra un salaire brut de 6.373,17 Francs, soit 151,67 X 42,02 Francs.

LES NOUVELLES REGLES DE CALCUL DES HEURES SUPPLEMENTAIRES

Le dispositif AUBRY pose de nouvelles règles de calcul des heures supplémentaires.

Devient ainsi une heure supplémentaire toute heure effectuée au-delà des 35 heures légales qui devront s’appliquer de plein droit aux entreprises de 20 salariés et moins à compter du 1er Janvier 2002.

Plusieurs bonifications sont prévues en fonction du quantum d’heures supplémentaires effectuées  :
 

1°)- La bonification jusqu’à la 39ème heure.

Les heures supplémentaires jusqu’à la 39ème heure incluse donnent droit à une bonification de 10 %.
Cette bonification peut prendre la forme d’une majoration de salaire ou d’un repos compensateur de 6 minutes par heure supplémentaire.

Attention, ce mécanisme est applicable jusqu’au 31 Décembre 2000 pour les entreprises de plus de 20 salariés et pendant l’année 2002 pour les autres entreprises.

En effet, au-delà de ces dates butoirs, la bonification passera de plein droit de 10 à 25 %.
 

2°)- La bonification prévue de la 40ème heure à la 43ème heure.

Dès l’application du dispositif AUBRY dans les entreprises concernées, chacune des heures supplémentaires de la 40ème heure à 43ème heure donnera lieu à une bonification de 25 %, soit sous forme de majoration de salaire soit de repos compensateur.
 

3°)- La bonification majorée à partir de la 44ème heure.

Le dispositif AUBRY prévoit que la bonification horaire sera de 50 % à compter de la 44ème heure.
 

LA MISE EN PLACE DE L’AMéNAGEMENT DU TEMPS DE TRAVAIL.

Appliquer le dispositif de la loi sur la réduction du temps de travail impose le choix d’une procédure spécifique, laquelle dépend de l’environnement de l’entreprise.

Les lois AUBRY incitent fortement à une négociation de la mise en place du dispositif de réduction du temps de travail au sein de l’entreprise.
Sans entrer dans de grandes explications trop complexes, le chef d’entreprise aura le choix entre cinq options :

1°)- Le chef d’entreprise abaisse unilatéralement la durée du travail.

En clair, l’employeur décide de son chef de fixer les horaires de travail de son personnel à 35 heures au lieu de 39 heures.

Prenons pour illustrer ce cas de figure, l’exemple de la société A qui avait une durée de 39 heures hebdomadaires et fonctionnait selon les horaires suivants  :

- du lundi au jeudi :  journée de huit heures de travail

- vendredi :  journée de sept heures de travail

La société A décide d’appliquer les 35 heures de manière unilatérale simplement en modifiant les horaires de travail de la manière suivante  :

 - du lundi au vendredi  : journée de sept heures de travail

Toutefois, le chef d’entreprise ne sera guère enclin à appliquer unilatéralement le dispositif d’aménagement du temps de travail dans la mesure où le dispositif AUBRY ne permet de bénéficier des aides prévues qu’en cas d’accord préalable sur la réduction du temps de travail.

En effet, le législateur encourage fortement à la négociation comme nous le verrons plus loin.
 

2°)- La mise en place de jours de réduction du temps de travail (JRTT).

Les lois sur l’aménagement du temps de travail prévoient que la réduction de la durée du travail peut prendre la forme de jours de repos, appelés jours de réduction du temps de travail (JRTT).

Il reviendra à un accord d’entreprise de fixer les modalités de ces jours de réduction du temps de travail.

Attention toutefois, en l’absence d’accord, la loi prévoit que deux jours sont attribués par période de quatre semaines dans le cas où la durée hebdomadaire du travail serait fixée à 39 heures.
 

3°)- Un accord de modulation du temps de travail : pour certaines entreprises.

Cette formule offre la possibilité pour une société de compenser ses périodes hautes d’activité de travail par des périodes de basses activités.

Cela impose nécessairement un accord au sein de l’entreprise.

Par ailleurs, elle devrait concerner certaines catégories de structures soumises au cours de l’année à des fluctuations importantes d’activités.
 

4°)- Le recours au compte épargne temps.

Le compte épargne temps est un outil qui permet au salarié de capitaliser des congés qu’il ne souhaite pas utiliser dans l’immédiat en vue de prendre un congé non rémunéré.

Un accord d’entreprise est nécessaire.
 

5°)- Le régime des forfaits en jours ou en heures.

Ce régime s’applique à certains cadres et se concrétise par une convention individuelle de forfait en heures ou en jours que nous verrons plus en détail plus loin.

UNE NOUVELLE APPROCHE DU TEMPS PARTIEL. 

Jusqu’à l’intervention des lois AUBRY, un salarié était considéré comme étant à temps partiel à partir de l’instant où son horaire de travail était inférieur de plus de 1/5ème à la durée légale de 39 heures.

A partir des lois sur l’aménagement du temps de travail, doivent être considérés comme étant à temps partiel les salariés dont l’horaire est inférieur à la durée légale de 35 heures.
 

1°)- La mise en place du temps partiel.

Elle peut se faire à la suite d’un accord collectif, à l’initiative soit de l’employeur soit du salarié intéressé, cela après information de l’inspection du travail.
 

2°)- Le temps partiel à la demande du salarié.

Le salarié doit faire sa demande au mois 6 mois avant le début du nouvel horaire.

Le chef d’entreprise doit lui répondre dans un délai de trois mois à compter de la réception de la demande.

A noter que l’employeur ne peut s’opposer à une telle demande que dans deux cas de figure :

- en l’absence d’emploi disponible correspondant à la qualification du salarié ;

- si l’entreprise démontre que le temps partiel sollicité créerait un préjudice à la bonne marche de son fonctionnement.
 

3°)- Les heures complémentaires sont possibles dans la limite de 10 %.

L’employeur peut demander au salarié exerçant à temps partiel d’accomplir des heures complémentaires dans la limite de 10 % de la durée de travail prévu au contrat.

Ainsi, un salarié à temps partiel qui accomplirait dans le cadre de son contrat de travail 23 heures hebdomadaires, soit 100 heures par mois, pourrait accomplir des heures complémentaires dans la limite de 10 heures mensuelles (10 %).

De plus, en aucun cas l’accomplissement de ces heures complémentaires ne devra entraîner un dépassement de la durée hebdomadaire légale de travail, soit 35 heures.
 

4°)- L’employeur est soumis à un préavis.

La loi prévoit que le chef d’entreprise doit formuler sa demande d’heures complémentaires au salarié au moins trois jours à l’avance.

A défaut de respecter ce préavis de trois jours, le salarié est fondé à refuser d’effectuer les heures complémentaires demandées.
 

5°)- Le contenu du contrat de travail à temps partiel.

Ce contrat doit fixer la répartition des horaires ainsi que les modalités de modification éventuelle de la durée du travail.

Attention, toute modification de la répartition de l’horaire de travail doit être portée à la connaissance du salarié au moins sept jours à l’avance.

Il convient de préciser sur ce point, que même si elle est prévue dans le contrat de travail, une telle modification de la répartition des horaires peut être contestée et refusée si le salarié concerné démontre qu’une telle modification est incompatible soit :

- avec des obligations familiales impérieuses ;
- avec le suivi d’un enseignement  ;
- avec une activité chez un autre employeur ;
- avec une activité professionnelle non salariée.
 

6°)- La remise en cause de l’abattement en matière de cotisations sociales.

Le dispositif AUBRY remet en cause l’abattement de 30 % sur les cotisations patronales de sécurité sociale qui s’appliquait jusqu’à lors aux contrats de travail à temps partiel.

La disparition de cet abattement se fera par étape.

Dans un premier temps, il sera supprimé pour tous les contrats de travail à temps partiel conclus à compter du 1er Janvier 2001 pour les structures de plus de 20 salariés.

Dans un deuxième temps, l’abattement disparaîtra complètement à compter du 1er Janvier 2003 pour toutes les autres entreprises.

A noter que l’abattement reste acquis pour les contrats de travail à temps partiel conclu avant l’entrée en vigueur de la nouvelle durée légale du travail de 35 heures.

Il en sera de même pour les contrats de travail à temps partiel établis avant les dates fatidiques précitées, c’est-à-dire avant le 1er Janvier 2001 pour les structures de plus de 20 salariés et avant le 1er Janvier 2003 pour les autres structures.

LE NOUVEAU DISPOSITIF D’ALLEGEMENT DES COTISATIONS PATRONALES DE LA LOI AUBRY II.

Pour assurer la promotion et la réussite, par la voie négociée, de l’application de la réduction du temps de travail, la loi AUBRY II est venue mettre en place un dispositif d’allègement des cotisations patronales pour les entreprises :

- qui réduisent la durée collective du travail à 35 heures hebdomadaires ou encore à 1600 heures de travail dans l’année ;

- et qui s’engagent par ailleurs à préserver ou à créer des emplois.

A noter que lorsque l’accord conclu sur la réduction du temps de travail prévoit des recrutements, ceux-ci doivent être effectifs dans un délai de 12 mois à partir de la réduction réalisée.

L’allégement est constitué  :

- d’une part, d’une aide pérenne et forfaitaire de 4.000,00 Francs par an et par salarié  ;

- et d’autre part, d’une aide dégressive annuelle, constituée par un allègement de charges sur les bas et moyens salaires, pour les salariés dont le salaire est inférieur à 1,8 fois le SMIC, soit actuellement 12.782,00 Francs.

L’aide dégressive dépend donc de la rémunération allouée au salarié et est déterminée sur la base du barème de calcul suivant (actualisé sur la base du SMIC en vigueur actuellement)  :

-  400,00 Francs pour les salariés percevant 170 % du SMIC (12.072,00 Francs) ;
- 1.900,00 Francs pour les salariés percevant 160 % du SMIC (11.362,00 Francs) ;
- 3.700,00 Francs pour les salariés percevant 150 % du SMIC (10.652,00 Francs) ;
- 5.600,00 Francs pour les salariés percevant 140 % du SMIC (9.942,00 Francs) ;
- 7.900,00 Francs pour les salariés percevant 130 % du SMIC (9.232,00 Francs) ;
- 10.600,00 Francs pour les salariés percevant 120 % du SMIC (8.522,00 Francs) ;
- 13.700,00 Francs pour les salariés percevant 110 % du SMIC (7.812,00 Francs) ;
- 17.500,00 Francs pour les salariés percevant le SMIC (7.101,38 Francs).

Pour illustrer un exemple d’allègement de charges, nous prendrons le cas d’un salarié rémunéré à plein temps à 35 heures sur la base de 1,6 fois le SMIC (soit un salaire brut de 11.362,00 Francs).

L’entreprise bénéficiera donc pour ce salarié un allègement de charges s’élevant à 1.900,00 Francs.

A noter que cet allègement est en principe cumulable avec les aides incitatives allouées par la loi AUBRY I ainsi qu’avec l’aide à la réduction du temps de travail prévue par la loi de Robien du 11 Juin 1996 (4) (abrogée par la loi AUBRY I du 13 Juin 1998).

Attention toutefois : en cas de cumul l’aide forfaitaire précitée se trouve supprimée.

De même, le nouveau dispositif d’allègement mis en place par la loi AUBRY II du 19 Janvier 2000 est incompatible avec les autres exonérations totales ou partielles de charges.
 

LA LOI AUBRY II INSTITUE UNE AIDE INCITATIVE POUR LES NOUVELLES ENTREPRISES.

La loi du 19 Janvier 2000 a mis en place une aide quinquennale pour les entreprises créées après son entrée en vigueur.

L’aide est allouée de la manière suivante :

- 7.000,00 Francs la 1ère année ;
- 6.000,00 Francs la 2ème année ;
- 5.000,00 Francs les trois dernières années.

Cette aide est soumise toutefois à deux conditions :

- d’une part, l’entreprise doit fixer la durée collective du travail hebdomadaire à 35 heures au plus ;

- d’autre part, tous les salariés doivent percevoir une rémunération mensuelle au moins égale à 169 fois le SMIC horaire.

LES CADRES ET LA LOI SUR LES 35 HEURES : Une application adaptée.

La loi sur la réduction du temps de travail prévoit un dispositif particulier pour les cadres, dispositif qui distingue trois catégories de cadres soumises chacune à une réglementation particulière.
 

1°)- Les cadres dits cadres dirigeants.

Sous cette dénomination, on recouvre les personnes ayant un niveau élevé de rémunération, des responsabilités importantes et une grande indépendance dans l’organisation de leur travail.

Le dispositif AUBRY les exclut de la réforme sur les 35 heures car ils sont assimilés à des mandataires sociaux.
 

2°)- Les cadres dits cadres intégrés.

Il s’agit des salariés qui font partie intégrante d’une équipe et se trouvent soumis à ce titre au contrôle et aux consignes de leurs supérieurs hiérarchiques.

Le dispositif AUBRY sur les 35 heures s’applique totalement à cette catégorie de cadres.
 

3°)- Les cadres dits non intégrés ou intermédiaires.

Il s’agit des cadres n’appartenant à aucune des deux catégories précitées.

Cette dernière catégorie bénéficie du dispositif de réduction du temps de travail selon certaines modalités tenant compte de la spécificité de leurs fonctions.

Trois possibilités peuvent être envisagées pour ces cadres.

En premier lieu, ces cadres peuvent conclure une convention de forfait individuel sur la base de la semaine ou du mois, sous la réserve de respecter les durées maximales légales.

En deuxième lieu, ils peuvent encore conclure une convention de forfait annuel en heures, avec la possibilité de déroger aux durées maximales hebdomadaire et quotidienne.

Enfin en troisième lieu, les cadres non intégrés peuvent, sous réserve de bénéficier d’un certain degré d’autonomie, conclure une convention de forfait en jours dans la limite de 217 jours par an, étant précisé que dans ce cas les durées maximales quotidienne et hebdomadaire ne sont pas applicables.
 

Voilà l’essentiel des dispositions mises en place par la récente loi sur l’aménagement et la réduction du temps de travail.

Les chefs d’entreprise devront très tôt préparer cette échéance qui se mettra en place pour l’ensemble des entreprises françaises à compter du 1er Janvier 2002.

En effet, pour réussir dans de bonnes conditions le passage aux 35 heures, le dispositif AUBRY, impose au préalable une réflexion de forme et de fond qui devra permettre à l’entreprise de mettre en place la formule la plus adaptée à son environnement social et économique.

Patrick LINGIBé
Avocat au Barreau de la Guyane
Le 17 Septembre 2000


1) Arrêt cité dans la Circulaire du Ministre de l’Emploi et de la Solidarité n° 2000-3 du 3 Mars 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail. (retour au texte)

2) Le législateur n’a pas défini ce que recouvre la notion dite d’emplois équivalents. Sous réserve de l’appréciation des tribunaux et sauf à vider ladite notion de son sens littéral, par emplois non équivalents, il faudrait entendre des emplois atypiques exercés au sein de l’entreprise concernée. (retour au texte)

3) Le législateur n’a pas défini ce que recouvre la notion dite d’emplois équivalents. Sous réserve de l’appréciation des tribunaux et sauf à vider ladite notion de son sens littéral, par emplois non équivalents, il faudrait entendre des emplois atypiques exercés au sein de l’entreprise concernée. (retour au texte)

4) Pour mémoire rappelons que la loi de Robien subordonnait l’allègement des cotisations sociales à au moins deux conditions :
- d’une part, une réduction de l’horaire collectif de travail d’au moins 10 % et un recrutement d’au moins 10 % de salariés supplémentaires avec une obligation de maintenir cet effectif supplémentaire pendant au moins deux années  ;
- d’autre part, la mise en place de la réduction du temps de travail par un accord collectif ainsi que la conclusion d’une convention avec l’état. (retour au texte)

© - Tous droits réservés - Patrick LINGIBÉ - 18 octobre 2000

 


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