La cour n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le paiement d’une commission, à supposer même qu’il soit constitutif d’un acte anormal de gestion, ne pouvait être regardé comme un avantage occulte au sens des dispositions du c de l’article 111 du code dès lors que la commission litigieuse avait été comptabilisée par la société Bernard Tapie Finance selon un libellé permettant d’identifier l’objet de la dépense et son bénéficiaire, la société allemande Bernard Tapie Finance GMBH.
CONSEIL D’ETAT
Statuant au contentieux
N° 224350
MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE
c/ Compagnie européenne de distribution et de pesage
M. Salesse, Rapporteur
Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement
Séance du 7 novembre 2001
Lecture du 5 décembre 2001
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d’Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)
Vu le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE, enregistré le 21 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; le ministre demande que le Conseil d’Etat annule l’arrêt du 31 mai 2000 de la cour administrative d’appel de Paris réformant le jugement du 3 juillet 1997 du tribunal administratif de Paris, en tant, d’une part, que la cour n’a remis à la charge de la société anonyme Bernard Tapie Finance aux droits de laquelle vient la société Compagnie européenne de Distribution et de Pesage (CEDP), le supplément d’impôt sur les sociétés portant sur la somme de 5 930 000 F auquel elle avait été assujettie au titre de l’année 1991 qu’au taux de 5/58 et a. d’autre part, rejeté le surplus de ses conclusions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
le rapport de M. Salesse, Maitre des Requêtes,
les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société Compagnie européenne de Distribution et de Pesage,
les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Sur la réintégration dans les bases imposables au supplément d’impôt sur les sociétés et à la retenue à la source, au titre de l’année 1991, de la commission de 55 970 000 F versée à la société Clinvest :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’administration a regardé la commission versée à la société Clinvest par la société Bernard Tapie Finance comme un avantage occulte accordé par celle-ci à sa filiale allemande Bernard Tapie Finance GMBH ; qu’elle a, en conséquence, réintégré ladite commission dans les bases imposables au supplément d’impôt sur les sociétés prévu par le c) du 1 de l’article 219 du code général des impôts et à la retenue à la source prévue par le 2 de l’article 119 bis du même code, alors applicables ;
Considérant qu’en jugeant que le paiement de cette commission, à supposer même qu’il soit constitutif d’un acte anormal de gestion, ne pouvait être regardé comme un avantage occulte au sens des dispositions du c de l’article 111 du code dès lors que la commission litigieuse avait été comptabilisée par la société Bernard Tapie Finance selon un libellé permettant d’identifier l’objet de la dépense et son bénéficiaire, la société Bernard Tapie Finance GMBH, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ; qu’ainsi le ministre n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qui concerne ladite commission ;
Sur la réintégration. au titre de l’année 1991. dans les bases imposables au supplément d’impôt sur les sociétés, d’une somme de 5 930 000 F facturée à la société Bernard Tapie Finance par la SNC Groupe Bernard Tapie (GBT) :
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’administration a réintéaré dans les bases imposables au supplément d’impôt sur les sociétés de la société Bernard Tapie Finance au titre de l’année 1991 une commission d’un montant de 5 930 000 F versée à la SNC groupe Bernard Tapie (GBT) au motif que la commission rémunérait des prestations. fictives-, que le taux de majoration de cet impôt, fixé par l’administration à 8/58 du montant net distribué, a été ramené par la cour administrative d’appel à un taux de 5/58 correspondant à celui applicable à l’exercice 1990, au motif que la distribution ne pouvait provenir de l’exercice 1991, lequel était déficitaire ;
Considérant qu’aux termes de l’article 219 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l’exercice 1991 : "1. (..) Le taux de l’impôt est fixé à 34 %./ Toutefois (..) c. Le taux de l’impôt sur les sociétés est porté à 42 % pour les distributions, au sens du présent code, effectuées par les entreprises au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1989./ Pour l’application de l’alinéa précédent, un supplément d’impôt sur les sociétés, égal à 3/58 du montant net distribué est dû sur ces distributions (..) Le supplément est également dû sur les sommes réputées distribuées au cours de ces exercices en application des articles 109 à 115 quinquies-1./ Pour les distributions effectuées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1990, le taux du supplément défini à l’alinéa précédent est porté à 5/58 du montant net distribué (..) ainsi que des sommes réputées distribuées./ Pour les distributions effectuées au cours des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1991, le taux du supplément défini à l’alinéa précédent est porté à 8/58 du montant net distribué (..) ainsi que des sommes réputées distribuées" ;
Considérant qu’en jugeant qu’il résultait de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi de finances pour 1989, que pour le calcul du supplément d’impôt dû sur les sommes réputées distribuées, il y avait lieu d’appliquer le taux fixé pour l’exercice le plus récent au cours duquel a été réalisé un bénéfice permettant cette distribution, soit en l’espèce l’exercice 1990, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ; qu’ainsi le ministre n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qui concerne ladite commission ;
Sur les conclusions de la Compagnie européenne de Distribution et de Pesage tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner l’Etat à payer à la Compagnie européenne de Distribution et de Pesage une somme de 20 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L’Etat est condamné à payer à la Compagnie européenne de Distribution et de Pesage une somme de 20 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et à la Compagnie européenne de Distribution et de Pesage.
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Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article452