Cour administrative d’appel de Paris, 1er juin 2004, n° 00PA02602, SCI Jeannine et Bernard I. et autres c/ Commune de Montigny s/ Loing

En vertu de l’article L.123-5 du code de l’urbanisme, lorsque l’établissement d’un plan d’occupation des sols est prescrit ou lorsque la révision d’un plan approuvé a été ordonné, l’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer dans les conditions et délais prévus à l’article L.111-8 sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan.

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

N° 00PA02602 - 00PA02613

M. Bernard I. et autres
SCI JEANNINE
c/ Commune de Montigny s/Loing

Mme VETTRAINO
Président

M. LERCHER
Rapporteur

M. DEMOUVEAUX
Commissaire du Gouvernement

Séance du 18 mai 2004
Lecture du 1er juin 2004

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE PARIS

VU, 1°), la requête et le mémoire, enregistrés au greffe de la cour le 10 août 2000 et le 13 novembre 2000, sous le n° 00PA02602, présentés pour M. Bernard I., M. J. L., Mme Sylvie S., M. Francis N., M. Eric P., M. Jacques F., M. Fernando G., M. Gilbert C., Mme Marcelle J., M. Patrick P., M. Jacques A., M. Michel J., Mme Fernande L., M. André D., M. Gérard P., demeurant tous à Montigny-sur-Loing 77690, par Me POMPEI, avocat ; les requérants demandent à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 991321 en date du 27 avril 2000, par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l’annulation du permis de construire tacite délivré le 10 février 1999 à la SCI JEANNINE ;

2°) d’annuler le permis de construire attaqué ;

3°) de verser aux requérants une indemnité de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;

VU, 2°), la requête et le mémoire, enregistrés au greffe de la cour le 14 et le 16 août 2000, sous le n° 00PA02613, présentés pour la SCI JEANNINE, dont le siège est 14 rue Pierre Cloix, 77690 Montigny-sur-Loing, par la SCP DUMONT BORTOLOTTI BARATEIG, avocats ; la SCI JEANNINE demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 991323 en date du 27 avril 2000, par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du maire de Montigny-sur-Loing, en date du 9 février 1999, prononçant le sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ;

2°) d’annuler la décision du maire attaquée ;

3°) de condamner la commune de Montigny-sur-Loing à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;

VU toutes les autres pièces du dossier ;

VU la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans les relations avec les administrations ;

VU le code de l’urbanisme ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 18 mai 2004 :
- le rapport de M. LERCHER, premier conseiller,
- les observations de Me HARRY, avocate, pour la SCI JEANNINE,
- et les conclusions de M. DEMOUVEAUX, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de M. Bernard I., M. J. L., Mme Sylvie S., M. Francis N., M. Eric P., M. Jacques F., M. Fernando G., M. Gilbert C., Mme Marcelle J., M. Patrick P., M. Jacques A., M. Michel J., Mme Fernande L., M. André D., M. Gérard P., d’une part, et de la SCI JEANNINE, d’autre part, présentent à juger des questions connexes ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la SCI JEANNINE a déposé une demande de permis de construire auprès des services de la commune de Montigny sur Loing le 10 novembre 1998 ; que la subdivision de l’équipement de Moret sur Loing a accusé réception de cette demande au nom du maire de Montigny sur Loing le 2 décembre 1998, en informant la société pétitionnaire que le délai d’instruction courait jusqu’au 10 février 1999 ; qu’en l’absence de décision explicite à cette date, la société pétitionnaire s’est trouvée bénéficiaire d’un permis de construire tacite ; que, cependant, par décision du 9 février 1999, notifiée à la SCI JEANNINE le 11 février 1999, le maire de Montigny sur Loing a sursis à statuer sur la demande de permis de construire sus mentionnée au motif que ladite demande compromettait l’exécution du futur plan d’occupation des sols ; que cette décision, notifiée postérieurement à la date d’acquisition du permis de construire tacite, a eu pour effet de retirer à la SCI JEANNINE le permis dont elle était bénéficiaire ;

Sur la requête n° 00PA02602, présentée par M. I. et autres :

Sans qu’il soit besoin de statuer sur les moyens de la requête :

Considérant que M. I. et autres font appel du jugement du 27 avril 2000, par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à l’annulation du permis de construire tacite délivré le 10 février 1999 à la SCI JEANNINE ; qu’à la date de leur demande, enregistrée au secrétariat greffe du tribunal administratif le 8 avril 1999, la SCI JEANNINE n’était plus bénéficiaire du permis de construire attaqué, par l’effet de la décision de retrait notifiée le 11 février 1999 ; que leur demande devant le tribunal administratif était donc sans objet et devait, pour ce motif, être déclarée irrecevable ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande ;

Sur la requête n° 00PA02613, présentée par la SCI JEANNINE :

Considérant qu’aux termes de l’article 23 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Une décision implicite d’acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l’autorité administrative : 1° Pendant le délai de recours contentieux lorsque des mesures d’information des tiers ont été mises en œuvre " ;

Considérant que la SCI JEANNINE fait appel du jugement du 27 avril 2000, par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du maire de Montigny-sur-Loing, en date du 9 février 1999, notifié le 11 février 1999, prononçant le sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ; que cette décision, notifiée postérieurement à la date d’acquisition du permis de construire tacite, a eu pour effet de retirer à la SCI JEANNINE le permis dont elle était bénéficiaire ; que ce retrait, notifié avant l’expiration du délai de recours contentieux, ne pouvait légalement intervenir qu’en cas d’illégalité dudit permis de construire tacite ;

Considérant qu’en vertu de l’article L.123-5 du code de l’urbanisme, lorsque l’établissement d’un plan d’occupation des sols est prescrit ou lorsque la révision d’un plan approuvé a été ordonné, l’autorité compétente peut décider de surseoir à statuer dans les conditions et délais prévus à l’article L.111-8 sur les demandes d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan ; qu’il n’est pas contesté qu’à la date du 10 février 1999 à laquelle la SCI JEANNINE a bénéficié d’un permis tacite pour construire un bâtiment à usage commercial et un bâtiment à usage d’entrepôt artisanal sur le même terrain, sis 62 route de la Marlotte, à Montigny-sur-Loing, le plan d’occupation des sols de ladite commune était en révision depuis le 13 juin 1997 ; que le projet de révision prévoyait, dans la zone UBa dans laquelle se situe la construction envisagée par la SCI JEANNINE, l’interdiction des constructions à usage commercial et de service, afin de préserver le caractère résidentiel de la zone ; qu’ainsi, en accordant tacitement le permis de construire demandé par la SCI JEANNINE, le maire de Montigny-sur-Loing a autorisé une opération qui était manifestement de nature à compromettre l’exécution du futur plan d’occupation des sols ; que, par suite, il pouvait légalement rapporter sa décision implicite du 10 février 1999, entachée d’illégalité, ainsi qu’il l’a fait par son arrêté notifié le 11 février 1999, en lui substituant une décision de sursis à statuer sur la demande présentée par la SCI JEANNINE ; que ladite décision est suffisamment motivée ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SCI JEANNINE n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande dirigée contre cette dernière décision ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de rejeter les conclusions de toutes les parties tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête n° 00PA02602, présentée par M. Bernard I., M. J. L., Mme Sylvie S., M. Francis N., M. Eric P., M. Jacques F., M. Fernando G., M. Gilbert C., Mme Marcelle J., M. Patrick P., M. Jacques A., M. Michel J., Mme Fernande L., M. André D., M. Gérard P. est rejetée.

Article 2 : La requête n° 00PA02613, présentée par la SCI JEANNINE est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l’application des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

_________________
Adresse originale : http://www.rajf.org/spip.php?article2636