Conseil d’Etat, 10 mars 2004, n° 248886, Judith L.

Les dispositions des deuxième et troisième alinéas du I de l’article 45 du décret du 6 juin 1984 rapprochées de celles du même article 45 dans leur rédaction antérieure au décret n° 97-1121 du 4 décembre 1997, doivent être interprétées comme impliquant que les rapports des rapporteurs soient rédigés au plus tard pour la séance au cours de laquelle les candidatures sont examinées.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N° 248886

Mme L.

Mme Leroy
Rapporteur

M. Keller
Commissaire du gouvernement

Séance du 18 février 2004
Lecture du 10 mars 2004

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 4ème et 5ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par Mme Judith L. ; Mme L. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l’éducation nationale a, d’une part, rejeté son recours hiérarchique contre la décision du conseil national des universités, en date du 1er février 2002, rejetant sa candidature à la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités et, d’autre part, refusé de l’inscrire sur cette liste de qualification ;

2°) d’annuler la décision du 1er février 2002 du conseil national des universités ;

3°) d’enjoindre, sous astreinte, au conseil national des universités et au ministre de l’éducation nationale de procéder à son inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités ou, à titre subsidiaire, de prendre une nouvelle décision ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

Vu le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Leroy, Conseiller d’Etat,
- les conclusions de M. Keller, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu’aux termes des deuxième et troisième alinéas du I de l’article 45 du décret du 6 juin 1984 : "Après avoir entendu deux rapporteurs désignés par son bureau pour chaque candidat, la section compétente du conseil national des universités arrête, par ordre alphabétique, la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités. Les rapporteurs, qui peuvent recueillir, sur les dossiers des candidats, l’avis écrit d’experts extérieurs, établissent des rapports écrits." ; que ces dispositions rapprochées de celles du même article 45 dans leur rédaction antérieure au décret n° 97-1121 du 4 décembre 1997, doivent être interprétées comme impliquant que les rapports des rapporteurs soient rédigés au plus tard pour la séance au cours de laquelle les candidatures sont examinées ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’au moins un des rapports établis sur la candidature de Mme L. à l’inscription sur la liste de qualification aux fonctions des professeurs des universités n’a été rédigé qu’après la séance du 1er février au cours de laquelle cette candidature a été rejetée par la 19ème section du conseil national des universités ; qu’il suit de là que Mme L. est fondée à demander l’annulation de cette délibération ; qu’il y a lieu, par voie de conséquence, d’annuler la décision du ministre de l’éducation nationale rejetant le recours de Mme L. contre cette délibération ;

Sur les conclusions à fins d’injonction et d’astreinte :

Considérant que la présente décision implique nécessairement que la 19ème section du conseil national des universités se prononce à nouveau sur la candidature de Mme L. à l’inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités ; qu’il y a lieu, dès lors, en application de l’article L. 911-2 du code de justice administrative, d’enjoindre au ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche de réunir à nouveau la 19ème section du conseil national des universités dans le délai de trois mois ; que dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros que Mme L. demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La délibération du 1er février 2002 de la 19ème section du conseil national des universités est annulée en tant qu’elle rejette la candidature de Mme L. à l’inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités.

Article 2 : La décision implicite du ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche rejetant le recours de Mme L. est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche de réunir la 19ème section du conseil national des universités pour statuer à nouveau sur la candidature de Mme L. à l’inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : L’Etat payera à Mme L. la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de conclusions de la requête de Mme L. est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Judith L. et au ministre de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche.

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