Conseil d’Etat, 30 décembre 2003, n° 237800, M. Michel R. et M. Daniel L.

Les frais supportés par les militaires servant comme observateurs des Nations Unies, lorsque ceux-ci sont affectés à l’étranger sont compensés par le versement de l’indemnité de résidence. Dès lors que l’indemnité de résidence a pour objet de compenser les charges supportées par les militaires affectés à l’étranger, l’indemnité journalière de subsistance en mission versée forfaitairement et mensuellement par l’Organisation des Nations Unies et dont l’objet est identique à celui de l’indemnité de résidence a le caractère d’une rétribution au sens des dispositions du 4° de l’article 2 du décret du 1er octobre 1997. Les militaires en cause percevant cette indemnité de résidence, le ministre était tenu d’opérer les retenues sur solde contestées par les requérants.

CONSEIL D’ETAT

Statuant au contentieux

N°s 237800, 237801

M. R.
M. L.

M. Aguila
Rapporteur

M. Le Chatelier
Commissaire du gouvernement

Séance du 8 décembre 2003
Lecture du 30 décembre 2003

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d’Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 7ème et 5ème sous-section réunies)

Sur le rapport de la 7ème sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°), sous le n° 237800, la requête, enregistrée le 31 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Michel R. ; M. R. demande au Conseil d’Etat :

- l’annulation de la décision en date du 23 février 2001 par laquelle le directeur du centre territorial d’administration et de comptabilité de Lille a retenu sur sa solde un montant de 12870 F et a procédé au rappel de 11 008 F au titre de l’allocation "mission subsistance allowance" (MSA) versée par l’Organisation des nations unies (ONU) ;

- que soit enjoint au ministre de la défense de lui restituer dans un délai de deux mois les sommes indûment prélevées, avec les intérêts de droit ;

- la condamnation de l’Etat au versement de la somme de 8 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 237801, la requête, enregistrée le 31 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Daniel L. ; M. L. demande au Conseil d’Etat :

- l’annulation de la décision en date du 23 février 2001 par laquelle le directeur du centre territorial d’administration et de comptabilité de Lille a retenu sur sa solde un montant de 12870 F et a procédé au rappel de 11 008 F au titre de l’allocation "mission subsistance allowance" (MSA) versée par l’Organisation des nations unies (ONU) ;

- que soit enjoint au ministre de la défense de lui restituer dans un délai de deux mois les sommes indûment prélevées, avec les intérêts de droit ;

- la condamnation de l’Etat au versement de la somme de 8 000 F au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le décret n° 97-900 du 1er octobre 1997 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aguila, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. R. et de M. L.,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que le capitaine L. et le lieutenant-colonel R., affectés du 1er août 2000 au 31 juillet 2001 comme observateurs auprès de la Mission des Nations Unies pour l’organisation du référendum au Sahara Occidental (MINURSO), contestent la retenue qui a été pratiquée sur leur solde de février 2001 et qui correspond au montant de l’indemnité journalière de subsistance en mission payée par l’Organisation des Nations Unies (ONU) ;

Considérant qu’aux termes du 4° de l’article 2 du décret du 1er octobre 1997 fixant les modalités de calcul de la rémunération des militaires affectés à l’étranger : "... Outre les retenues, les cotisations et les prélèvements sociaux prévus par un texte législatif ou réglementaire, la rémunération peut être soumise à des réductions pour tenir compte : / - des rétributions que le militaire peut percevoir d’un gouvernement étranger ou d’un organisme international (...)" ; qu’aux termes de l’article 5 du même décret fixant les conditions de versement de l’indemnité de résidence à l’étranger : "L’attribution de l’indemnité de résidence est destinée à compenser forfaitairement les charges liées aux fonctions exercées, aux conditions d’exercice de ces fonctions et aux conditions locales d’existence" ; qu’il résulte de ces dispositions que les frais supportés par les militaires servant comme observateurs des Nations Unies, lorsque ceux-ci sont affectés à l’étranger comme l’étaient M. L. et M. R., sont compensés par le versement de l’indemnité de résidence ; que, dès lors que l’indemnité de résidence a pour objet de compenser les charges supportées par les militaires affectés à l’étranger, l’indemnité journalière de subsistance en mission versée forfaitairement et mensuellement par l’Organisation des Nations Unies et dont l’objet est identique à celui de l’indemnité de résidence a le caractère d’une rétribution au sens des dispositions du 4° de l’article 2 du décret du 1er octobre 1997 ; que les militaires en cause percevant cette indemnité de résidence, le ministre était tenu d’opérer les retenues sur solde contestées par les requérants ; que, par suite, MM. L. et R. ne sont fondés à demander ni l’annulation de la décision par laquelle le ministre de la défense a retenu 23 788 F sur leur solde en application des dispositions de l’article 2 du décret du 1er octobre 1997 ni la condamnation de l’Etat au paiement de cette somme ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie le cas échéant, d’un délai d’exécution" ;

Considérant que la présente décision qui rejette les conclusions des requérants n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans cette instance, soit condamné à payer à chacun des requérants la somme qu’ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de MM. R. et L. sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Daniel L., à M. Michel R. et au ministre de la défense.

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