Aux termes de l’article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales, les conseillers municipaux disposent d’un droit d’expression orale sur les questions touchant les affaires de la commune. Si le règlement intérieur du conseil municipal d’une commune a pu légalement réserver le droit d’expression aux conseillers présents à cette séance et le limiter, ce même règlement ne saurait, sans porter atteinte au principe d’égalité devant l’exercice du droit d’expression reconnu aux conseillers municipaux, réserver ce droit au rapporteur, au maire et à l’adjoint compétent, ni porter une atteinte excessive à l’exercice de ce même droit, en limitant le temps de parole des conseillers municipaux à une durée maximale de six minutes
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE CERGY-PONTOISE
N° 0104061
M. Antoine RINALDI
Mme JULLIARD
Rapporteur
Mme MOSSER
Commissaire du Gouvernement
Audience du 14 mai 2002
Lecture du 18 juin 2002
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise,
(1ère chambre),
Vu la requête, enregistrée le 10 août 2001, présentée par M. Antoine RINALDI ; M. Antoine RINALDI demande au Tribunal :
1°) de prononcer l’annulation de la délibération en date du 31 mai 2001 par laquelle le conseil municipal de la commune de Taverny a approuvé son règlement intérieur, en tant que cette délibération concerne les articles 13 et 16 dudit règlement ;
2°) de condamner la commune de Taverny à lui verser la somme de 914,69 euros (6 000 F) au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu la délibération attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la communication aux parties par le Tribunal le 7 mai 2002 d’un moyen d’ordre public tiré de la tardiveté de la requête ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 mai 2002 :
le rapport de Mme Julliard, conseiller ;
les observations de Me Sami Skander, au lieu et place de Me Jean-Claude Grimberg, avocat au Barreau du Val d’Oise, représentant M. Rinaldi et de Me Michel Gentilhomme, avocat au Barreau du Val d’Oise, représentant la commune de Taverny ;
et les conclusions de Mme Mosser, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Antoine RINALDI conteste la délibération en date du 31 mai 2001 par laquelle le conseil municipal de la commune de Taverny a approuvé son règlement intérieur, en tant que cette délibération concerne les articles 13 et 16 dudit règlement ; qu’il ressort des pièces du dossier que le requérant a adressé au sous-préfet de Pontoise un courrier en date du 11juin 2001, lui demandant d’intervenir pour que les articles contestés de la délibération en date du 31 mai 2001, soient retirés et qu’une nouvelle délibération soit adoptée par le conseil municipal de la commune de Taverny ; que cette demande doit être regardée comme tendant àce que le représentant de l’Etat dans le département mette en oeuvre la procédure prévue àl’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales susvisé, sur le fondement des dispositions de l’article L. 2131-8 de ce même code ; que cette demande a eu pour effet de prolonger les délais de recours à l’encontre de la délibération attaquée, jusqu’à l’intervention de la décision du sous-préfet de Pontoise, rejetant la demande de déféré de M. Antoine RINALDI, intervenue le 20 juillet 2001 ;
Sur les fins de non recevoir opposées à la requête :
Considérant, en premier lieu, que la commune de Taverny soutient que la délibération attaquée aurait un caractère confirmatif de délibérations adoptées en 1992 et 1996, et n’aurait pas eu pour effet d’ouvrir de nouveaux délais de recours à l’encontre la délibération en date du 31 mai 2001 ; qu’il ressort, toutefois, des pièces du dossier que la délibération en date du 31 mai 2001 porte approbation du nouveau règlement intérieur du conseil municipal pour la mandature 2001-2007 ; qu’en conséquence, cette délibération constitue un acte nouveau susceptible de recours contentieux dans les délais de droit commun ; qu’il ne ressort d’aucune pièce du dossier que la requête, enregistrée au greffe du tribunal le 10 août 2001, serait tardive ; que, par suite, la fin de non recevoir susanalysée doit être rejetée ;
Considérant, en second lieu, que M. Antoine RINALDI justifie, en sa qualité de conseiller municipal, contrairement à ce que soutient la commune de Taverny, d’un intérêt à agir ; que la circonstance, à la supposer établie, que le requérant aurait voté en 1996 en faveur des dispositions du règlement intérieur qu’il attaque aujourd’hui, est sans incidence sur l’intérêt à agir M. Antoine RiNALDI dans cette instance ; que, par suite, la fin de non recevoir susanalysée doit être également rejetée ;
Au fond :
Considérant, d’une part, qu’aux ternies de l’article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales susvisé : “Les conseillers municipaux ont le droit d’exposer en séance du conseil des questions orales ayant trait aux affaires de la commune. Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le règlement intérieur fixe la fréquence ainsi que les règles de présentation et d’examen de ces questions. A défaut de règlement intérieur, celles-ci sont fixées par une délibération du conseil municipal” ;
Considérant, d’autre part, qu’aux ternies de l’article 13 du règlement intérieur du conseil municipal de la commune de Taverny adopté par la délibération attaquée en date du 31 niai 2001 : “Le compte-rendu analytique de la séance concernée est mis au voix pour adoption. Les conseillers ne peuvent intervenir à cette occasion, sans excéder trois minutes, que s’ils étaient présents à cette séance et sur une rectification à apporter au compte-rendu...”, et qu’aux termes de l’article 16 du même règlement : “S’agissant des affaires inscrites avec débat à l’ordre du jour et après présentation, par le ou les rapporteurs désignés, d’un résumé oral qui peut lui-même être précédé ou suivi d’une intervention du maire ou de l’adjoint compétent.... La parole est ensuite accordée par le maire aux conseillers municipaux qui la demandent... Les conseillers prennent la parole dans l’ordre déterminé par le maire ... A l’exception du rapporteur, du maire et de l’adjoint compétent, nul ne parle plus de deux fois sur la même question, avec une limite de temps de parole de six minutes...” ; que M. Antoine RINALDI conteste la délibération en date du 31 mai 2001 par laquelle le conseil municipal de la commune de Taverny a approuvé son règlement intérieur, en tant que cette délibération a approuvé les articles 13 et 16 dudit règlement ;
Considérant qu’il résulte des dispositions susrappelées de l’article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales que les conseillers municipaux disposent d’un droit d’expression orale sur les questions touchant les affaires de la commune ; que, si l’article 13 du règlement intérieur du conseil municipal de la commune de Taverny, qui est relatif aux conditions d’adoption du compte-rendu analytique de la séance précédente, a pu légalement réserver le droit d’expression aux conseillers présents à cette séance et le limiter, l’article 16 du même règlement, qui concerne le débat à l’ordre du jour, ne saurait, sans porter atteinte au principe d’égalité devant l’exercice du droit d’expression reconnu aux conseillers municipaux, réserver ce droit au rapporteur, au maire et à l’adjoint compétent, ni porter une atteinte excessive à l’exercice de ce même droit, en limitant le temps de parole des conseillers municipaux à une durée maximale de six minutes ; que , par suite, M. Antoine RINALDI est fondé à demander l’annulation de l’article 16 du règlement intérieur du conseil municipal de la commune de Taverny ;
Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de condamner la commune de Taverny à payer à M. Antoine RINALDI une somme de 800 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La délibération en date du 31 mai 2001 par laquelle le conseil municipal de la commune de Taverny a approuvé son règlement intérieur, en tant que cette délibération concerne l’article 16 dudit règlement, est annulée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Antoine RINALDI est rejeté.
Article 3 : La commune de Taverny versera à M. Antoine RiNALDI une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présentjugement sera notifié à M. Antoine RINALDI et à la commune de Taverny.
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